Combien étaient-ils ? 4000 ? 5000 ? 6000 ? Ou plus ? Impossible à dire tant les habitants de Mayotte s’étaient mobilisés pour la marche organisée dans le cadre de l’opération “Île morte”, faisant suite à l’agression mortelle d’un père de famille vendredi dernier. Un décès intervenu, qui plus est, à la fin d’une semaine de violences urbaines. Hier donc, alors que la tête du cortège atteignait son but, la préfecture, sa queue était encore présente sur la place de la République, lieu du rendez-vous et du départ. De mémoire de Mahorais, “On n’avait pas vu ça depuis 2011”, comme l’expliquait un des participants. Un succès pour l’initiateur encore anonyme du mouvement, mais surtout le signe d’un ras-le-bol généralisé, et commun à tous : l’insécurité dans laquelle Mayotte s’enfonce.
Un mouvement citoyen
Dans le cortège, de nombreux élus étaient présents. Maires, notamment Mohamed Majani, de Mamoudzou, ou Anchya Bamana de Sada ; parlementaires, mais aussi élus du Département. Le président Soibahadine Ramadini s’est ainsi exprimé en déclarant être conscient du travail que doivent mener, ensemble, les responsables politiques, en particulier sur la prise en charge des mineurs abandonnés. Les cadis étaient également présents.
Mais, au-delà de ces interventions, le mouvement était bel et bien un mouvement citoyen. Preuve en est les temps forts qui ont rythmé la manifestation. Des enfants ont ainsi répété en chœur “Plus jamais ça” durant plusieurs minutes, avant qu’une Marseillaise ne soit chantée par la foule. Un doua – prière musulmane – achevait cette visite devant la préfecture. Le lieu n’avait pas été choisi par hasard puisqu’il s’agissait d’alerter l’État sur l’inquiétude de plus en plus présente des citoyens, et sur l’insécurité de plus en plus incontrôlable qui s’empare de Mayotte.
Préoccupation majeure : la sécurité
L’agression mortelle de Christophe, père de famille de 38 ans, vendredi dernier fait suite à une semaine de violences entre bandes rivales. De quoi pousser la population à bout, et l’emmener à crier communément sa lassitude face à une situation qui s’enlise. Dans le cortège, toutes les discussions tournaient ainsi autour de cette problématique et des solutions possibles. “À l’époque, tout le village était responsable de l’éducation des enfants, expliquait un Mahorais, venu avec son fils. Il faut en revenir à cela pour cadrer ces jeunes.” Plus loin, un groupe se demandait quand l’État “Se déciderait à enfin envoyer des effectifs de police à la hauteur de la situation” (voir encadré). D’autres encore se questionnaient sur l’arrivée ou non d’un centre de réinsertion pour mineur. En somme, c’est bien d’un cri d’alarme dont il s’agissait.
Reste maintenant à savoir si celui-ci sera entendu par le préfet et l’État, et si ce drame permettra, au moins, de réveiller la conscience des décideurs.
Geoffroy Vauthier
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