« Suroccupation des lits de maternité, car impossibilité de transférer vers les centres de référence comme fait habituellement pour libérer de la place sur le site de Mamoudzou – 11 parturientes (femmes en phase d’accouchement, N.D.L.R) sur les brancards. Les minibus ne passent pas. Tentative échouée ce jour de rejoindre au moins le Nord » ;
« Risques de rupture de médicaments à compter de demain à Mramadoudou (le 13 avril) si des livraisons ne peuvent être effectuées » ;
« L’aide de l’hélicoptère a dû être demandée à plusieurs reprises pour des risques vitaux » ;
« À Dzaoudzi, l’équipe de nuit non relayée est toujours présente sur le site à cette heure » ;
« Les ambulances et véhicules du CHM sont arrêtés et fouillés » ;
« (…) même les barrages tenus par les syndicats ne laissent plus passer les agents et les véhicules hors ambulances qui sont fouillés systématiquement. Ils laisseraient passer uniquement les libéraux » ;
Il date du 12 avril, mais en dit long sur les conséquences que les blocages routiers font peser sur le centre hospitalier. Le compte rendu de la « réunion de crise » au CHM que nous nous sommes procurés est éloquent quant aux complications que les différents barrages font peser sur l’hôpital. L’institution médicale et son personnel, qui assurent pourtant au quotidien et avec les moyens qui lui sont accordés, la sécurité médicale de milliers d’habitants, est victime des barrages routiers sauvages, mais aussi de ceux mis en place par certains syndicalistes, ne serait-ce qu’en termes de manque de personnel puisqu’on y apprend que ce 11 avril, « Ce sont 164 agents qui n’ont pas pu prendre leur poste du fait des barrages » et que le jour de la réunion, « La tendance est identique à ce jour. »
Contactée, l’intersyndicale se désolidarise de ces cas. Dans un message envoyé « Aux copains sur les barrages », un des leaders du mouvement leur demande clairement de « laisser passer personnels médicaux et paramédicaux, ainsi que les véhicules de secours. »
« Épuisement des équipes et de l’encadrement »
Andréa* est infirmier. Il a ainsi dû enchainer 24h de travail – au lieu de 12 – pour pallier aux absences du jeudi 14 avril. Il n’est évidemment pas le seul dans ce cas-là. De quoi épuiser un personnel déjà largement sollicité au quotidien. Le document mentionne d’ailleurs « L’épuisement des équipes et de l’encadrement. »
Caroline*, infirmière vivant à Mamoudzou, a été emmenée à assurer deux gardes de nuits imprévues pour prévenir la poursuite des barrages, et donc la probable impossibilité pour sa collègue initialement prévue, de se rendre au CHM. De nombreux autres témoignages en ce sens nous sont parvenus. Dans ces conditions, les services tentent de s’entraider, ceux étant en effectif suffisant envoyant du personnel là où il en manque.
On apprend aussi que le Centre médico psychiatrique – victime d’une tentative de cambriolage au demeurant – a dû parfois annuler ses tournées dans l’île pour des visites à domicile : « Le chef de service regrettant que le dispositif mis en place sur la durée soit remis en cause en quelques jours. »
Les conséquences de l’insécurité
En parallèle des mouvements de blocages liés à la grève générale, l’insécurité qui a transpiré cette semaine, émeutes ou rackets sur les barrages, a également eu un fort impact sur le CHM. Dans le compte rendu que nous publions, nous pouvons ainsi lire dans la partie « Ce qui ressort de plus en plus fortement au fil des jours », « la demande forte de l’ensemble des professionnels médicaux et soignants de se faire accompagner et protéger par les forces de l’ordre » ou encore « la peur de faire le trajet compte tenu des agressions verbales et différentes menaces qu’ont à subir les agents qui ne peuvent souvent pas passer les barrages, même lorsqu’ils sont détenteurs d’une réquisition de l’hôpital. »
Jointe la semaine dernière, la direction du CHM se voulait rassurante, nous affirmant que la grève avait été anticipée, et que tout était mis en place pour assurer un service normal des soins, sur la base notamment de réquisition de personnel, quand celui-ci ne se porte pas tout simplement volontaire pour combler les absences. Nous avons tenté de la recontacter afin de connaître plus précisément la situation aujourd’hui, et les difficultés que pouvait subir le centre hospitalier dans ces conditions. En vain pour le moment, mais nous mettrons bien évidemment à jour cet article dès qu’une réaction et des précisions nous parviendront.
*Les prénoms ont été changés.
Geoffroy Vauthier
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