Semaine de l’environnement : comment lutter contre la prolifération des déchets ?

Sur le territoire, seulement 2,83 % des déchets produits sont triés. La sensibilisation de la population a malheureusement peu d’effets. Venu présenter son action pendant la Semaine de l’environnement organisée par la Somapresse dans les locaux, ce mercredi matin, la Sidevam envisage donc de mettre au point une filière locale en créant une nouvelle monnaie à l’échelle du territoire, qui permettrait aux consommateurs d’être gratifiés pour la collecte des déchets.

Quelle est la quantité de déchets triés à Mayotte ?

Au total 2,83 % des déchets produits sont triés sur l’île. « Au niveau français, ce chiffre est de l’ordre de 50 à 60 % et en Outre-Mer, de 40 % », souligne Chanoor Cassam, directeur général des services au sein de la Sidevam, qui assure la collecte des déchets sur le territoire. Pour exemple, 93 % du verre est enfoui alors qu’il pourrait être consigné ou valorisé. « C’est un constat un peu déprimant », concède le directeur général. La commune avec le plus fort taux de tri est Pamandzi avec 4,3 kg par an par habitant. « Cela reste très faible, mais on voit que la configuration sociale, le niveau de vie et le degré d’urbanisation des communes a un impact sur le tri », poursuit-il.

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Seulement 2,83 % des déchets produits sont triés sur l’île contre 50 à 60 % au niveau national.

Quels types de déchets et quelles quantités sont produites sur le territoire ?

Au total, 55 kg par an et par habitant de déchets « ultimes » – que l’on ne sait pas valoriser – sont produits sur le territoire. Les déchets recyclables sont l’autre grande catégorie d’ordures produites, avec 52 kg par habitant. Ils concernent les emballages, le papier ou le verre. Les déchets verts et compostables pèsent encore plus lourd avec 66 kg par habitant. Enfin, les déchets dangereux, le bois ou ceux résultant des activités de soins à risques infectieux, représentent 18 kg.

Où vont ces déchets ?

97 % d’entre eux sont enfouis, se retrouvent dans des décharges à ciel ouvert, au bord des routes ou en pleine nature. « Il n’existe pas d’infrastructures de valorisation sur le territoire », déplore Chanoor Cassam. Les déchets triés partent quant à eux en direction de l’Écopôle de Longoni. Là-bas, ils sont compressés pour former des balles, puis envoyés dans des territoires comme l’Inde ou l’Afrique du Sud. « Ces pays achètent les déchets pour les valoriser sur place mais on ne sait pas ce qu’ils deviennent », reconnaît l’intervenant.

Y a-t-il assez de sensibilisation auprès de la population ?

Si des campagnes de sensibilisation ont été faites, elles ont eu peu de poids sur le comportement de la population, selon le directeur général de la Sidevam. D’autant qu’elles ont été lancées assez tardivement en comparaison avec d’autres territoires. « Selon plusieurs habitants, c’est également aux agents de collecte de prendre en charge cette mission. Mais surtout, le tri est loin de leur préoccupation », souligne-t-il. Puisque sur un territoire où 77 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, l’objectif, avant de trier, est surtout de manger.

Quelles solutions pour augmenter la quantité de déchets triés ?

Au total, 80 000 tonnes de déchets par an sont enfouies sur le territoire. Et cela coûte cher à la collectivité. Alors que Mayotte, comme la Guyane, était exemptée de la taxe relative à l’enfouissement prévue dans la loi de finance, elle ne l’est plus depuis 2019. « En 2021, nous avons dû verser plus d’un million d’euros de taxes », souligne Chanoor Cassam. « Il est donc urgent de réduire l’enfouissement. »

Pour collecter les déchets sur les plages, dans les mangroves ou les lits de rivières, l’association Nayma a développé des ateliers et des chantiers d’insertion. Elle organise ainsi des sorties, avec des personnes éloignées de l’emploi, pour entretenir les espaces naturels menacés par les déchets. « Nous trouvons absolument de tout dans les mangroves : des machines à laver, des pneus, des emballages… », détaille Galiane Lavisse, responsable d’ingénierie et de développement de Nayma.

De son côté, l’association Yes we can nette, qui fait notamment de la sensibilisation dans les écoles, a créé une épicerie et une friperie solidaire qui, en l’échange d’apport de cannettes vides, propose de bénéficier de réductions de 30 à 40 % sur les produits.

Pour aller plus loin, la Sidevam porte un projet ambitieux. Afin d’inciter la population à trier et collecter les emballages vides, elle envisage de s’appuyer sur les Doukas. « Ils sont au nombre de 2.000 sur le territoire, ce sont des commerces de proximité qui maillent bien le territoire », souligne Chanoor Cassam. Ces magasins deviendraient ainsi des points de collecte. « L’idée est de récompenser les habitants qui déposent leurs emballages en leur permettant de repartir avec des produits du magasin. » Pour mettre en place ce système, le syndicat des déchets envisage de lancer une monnaie locale. L’idée serait ainsi de « rémunérer » les gestes de tri, tout en s’assurant que cet argent soit dépensé localement. « Ainsi, nous augmenterons le pouvoir d’achat, sans nourrir l’économie informelle », estime le directeur de Sidevam.

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