Il est l’homme de cette rentrée politique 2022. Durant tout l’été, Gérald Darmanin a multiplié les annonces dans le domaine de la sécurité. Présent sur tous les fronts, le ministre de l’Intérieur l’était aussi à Mayotte, du 21 au 23 août. Point né de la dernière pluie, le premier flic de France a profité de cette visite pour raviver les espoirs du peuple mahorais, en proie à une incessante délinquance, en témoignent les évènements de la semaine dernière. Voici les principales promesses que Beauvau a faites à Mayotte.
1- L’armée pour « rééduquer » les mineurs délinquants
Durant sa pérégrination mahoraise, Gérald Darmanin a ressorti du placard une proposition de campagne d’Emmanuel Macron : des centres d’encadrement militaire. Lors du débat de l’entre-deux tours, le président de la République avait en effet évoqué la possibilité d’une « rétention dans un environnement militaire, ce qui est une de mes propositions ». Le pensionnaire de l’Élysée n’a cependant rien inventé. Le colonel Michel Goya, désormais écrivain et chroniqueur, a rappelé sur Twitter que les « Jeunes en équipe de travail », des stages encadrés par l’armée et la gendarmerie, avaient été déployés en France de 1984 à 2004.
Dans la même phrase, Emmanuel Macron avait également évoqué la possibilité de travaux d’intérêt général pour les mineurs délinquants. Une solution prônée par les patrons mahorais, qui déplorent l’impact de la délinquance sur le tourisme ou l’investissement : « Votre dernier passage signe d’espoir nous a laissés un sentiment amer que la situation empirait plutôt que s’améliorait », écrit dans une lettre publique Carla Baltus, présidente du MEDEF Mayotte.
2- Un centre éducatif fermé en 2024
Outre cette idée, le ministre de l’Intérieur a ressassé le besoin d’une seconde prison à Mayotte, sans néanmoins faire d’annonce concrète en ce sens. Il a cependant soutenu, à l’instar du député Kamardine, le projet d’Éric Dupond-Moretti concernant un centre éducatif fermé d’ici la fin de l’année 2024. Ce dernier aura pour objectif le « réapprentissage de la vie quotidienne, en collectivité, s’appuyant sur la responsabilisation quant à l’acte commis, la prévention des conduites à risques et la sociabilisation pour une meilleure réinsertion », selon le communiqué du ministère de la Justice.
3- Une meilleure coopération police-justice
Elles sont loin, les images de Gérald Darmanin au cœur des manifestations policières devant l’Assemblée nationale, symboles de la fracture entre police et justice. Les membres du gouvernement font tout pour rabibocher les deux corps, à l’image de ce centre éducatif fermé réclamé à l’unisson. Sur l’île au lagon, la coopération est cependant loin d’être optimale, avec une justice quasiment impuissante face à la jeunesse des délinquants, parfois récidivistes, et le sentiment prégnant des forces de l’ordre d’être inutiles.
4- Un quatrième escadron de gendarmes mobiles
L’augmentation des effectifs de police et de gendarmerie à Mayotte est l’une des grandes fiertés du camp présidentiel, qui ne cesse d’avancer ses chiffres, à l’image du ministre de l’Intérieur. Quarante agents supplémentaires sont d’ores et déjà présents sur le territoire. Couplés à une meilleure organisation des groupes de sécurité de proximité, ils permettront un meilleur déploiement des unités de police. Ce n’est toutefois pas assez pour les syndicats, qui ambitionnent une « reconquête des zones de non-droit ». Ni pour Ali Nizary, président de l’union départementale des associations familiales de Mayotte, qui réclamait le classement du département en « zone d’urgence sécuritaire absolue ».
5- Un droit du sol plus ferme
Le texte sera présenté dans les toutes prochaines semaines. M. Darmanin souhaite restreindre le droit du sol à Mayotte, comme il l’a déclaré en début de semaine : « Tant que les deux parents ne sont pas régulièrement sur le territoire mahorais, […] et s’ils n’y sont pas depuis au moins un an, il n’y a aucune chance que leur enfant devienne français ou que les parents soient régularisés ». Actuellement, un enfant est français si l’un de ses deux parents est à Mayotte depuis plus de trois mois. Si ce texte est adopté par le Parlement, cette durée sera donc de plus d’un an. Une mesure saluée par les uns, inadaptée pour les autres, à l’image de Saïd Omar Oili, qui soulève le problème des enfants « qui n’auront pas de nationalité » et dont Mayotte devra s’occuper.
La lutte contre l’immigration clandestine (LIC), l’un des chevaux de bataille du ministre de l’Intérieur, pousse ce dernier à « lutter contre l’attractivité sociale » de Mayotte. Polémique, cette formule a immédiatement été pondérée lors de sa visite au Centre hospitalier de Mamoudzou, en assurant que tout le monde serait soigné, étrangers sans papiers compris.
6- Un contrôle des reconnaissances de paternité
Lors d’un récent entretien au JDD, Gérald Darmanin a évoqué des « reconnaissances frauduleuses de paternité » de la part d’hommes en règle à Mayotte, envers des enfants immigrés des Comores, de Madagascar, ou des côtes d’Afrique de l’est. « Ces pères doivent prouver qu’ils entretiennent l’enfant pendant trois ans et non plus seulement deux », a déclaré l’ancien maire de Tourcoing. La protection de l’enfance, indissociable des biais de l’immigration, a notamment été abordée par Charlotte Caubel durant ces trois jours.
7- Plus de matériel pour la surveillance des côtes
Pour prouver son action dans les domaines de la sécurité et de l’immigration, Gérald Darmanin a débuté sa visite par des rencontres avec les différents organes de la LIC. Il a notamment promis deux nouveaux radars à terre, et le remplacement de quatre autres. Sur le volet matériel, difficile d’être sceptique : les deux bateaux intercepteurs dont le garde des Sceaux avait parlé en août 2021 sillonnent bel et bien les eaux mahoraises. Les syndicats policiers en réclament cependant un de plus, et plus d’effectifs en mer.
Retrouvez l’intégralité du dossier consacré à la visite ministérielle dans le Mayotte Hebdo n°1008.
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