Libération d’agresseurs sexuels aux Comores : la commission des droits de l’homme interpelle le gouvernement

Le parquetier général assure que les prisonniers condamnés pour des faits d’agressions sexuelles ayant pu passer entre les mailles du filet étaient des mineurs au moment des faits. Un argumentaire qui peine à convaincre la commission nationale des droits de l’homme et des libertés laquelle appelle le gouvernement à rectifier le tir.

La libération de 60 détenus la semaine dernière de la prison de Moroni n’en finit pas de susciter des remous. Cette fois-ci c’est au tour de la commission nationale des droits de l’homme et des libertés (Cndhl) de monter au créneau. Dans un communiqué publié ce 5 avril, l’instance dirigée par Sittou Raghadat  Mohamed est revenue sur l’arrêté du ministre comorien de la Justice, Djae Ahamada Chanfi. Grâce à ce dernier, de nombreux prisonniers ont pu recouvré leur liberté depuis le 30 mars. Officiellement, il s’agit d’une mesure avalisée en conseil des ministres pour désengorger les centres pénitenciers du pays, dont la surpopulation carcérale n’est un secret pour personne. Le problème, il s’avère  que parmi les bénéficiaires se trouvent des personnes condamnées pour des faits d’agression sexuelles, des infractions criminalisées depuis un moment par les lois comoriennes, notamment le nouveau code pénal. C’est d’ailleurs pour cette raison que la commission nationale des droits de l’homme et des libertés qui est restée silencieuse sur de nombreux sujets a finalement réagi.  » Le Cndhl se réjouit des mesures prises par le gouvernement pour le désengorgement des prisons de la Grande Comore, d’Anjouan et de Mwali qui va intervenir dans les prochains jours. Mais nous sommes profondément préoccupés par le fait que des personnes condamnées pour agression sexuelle se trouvent sur  la liste des détenus qui ont bénéficié la mise en liberté conditionnelle« , lit-on dans le communiqué.

Vigilance

Un arrêté signé le 28 mars par le Garde des sceaux comorien a accordé une clémence à une soixantaine de détenus de la maison d’arrêt de Moroni. Le Procureur Général, Soilihi Djae qui supervisait l’opération sur place avait indiqué que seulement une catégorie de prisonniers était éligible à ce réaménagement de sanctions : Les plus de 60 ans et les jeunes de moins de 25 ans dont la conduite a été exemplaire pendant l’incarcération et qui ont purgé plus de la moitié de leurs peines. La décision du ministre de la Justice avait par ailleurs défini des délits dont les personnes reconnues coupables ne pouvaient être incluses sur la liste . C’est le cas des viols, de détournements de deniers publics, les assassinats ou les meurtres. Mais aux yeux de nombreux juristes, les agresseurs sexuels auraient dû manifestement en faire partie. Cela n’a malheureusement pas été le cas. Puisque certains d’entre eux jouissent d’une liberté conditionnelle. D’où l’appel à la prudence  émis par la commission nationale des droits de l’homme et des libertés. « La Cndhl appelle les autorités compétentes à procéder à une autre mesure de clémence pour libérer d’autres détenus, mais cette fois avec vigilance » , recommande la plus haute institution nationale chargée du respect des droits humains. Si cette dernière dit avoir apprécié qu’on ait privilégié  les jeunes âgés de moins de 25 ans, elle réitère néanmoins sa demande envers les autorités pour qu’elles améliorent davantage les conditions de détention en les alignant aux normes internationaux. L’Union des Comores est souvent pointée du doigt en matière de détention. On se rappelle de l’affaire d’Inssa Mohamed alias Bobocha, accusé d’avoir tenté d’ourdir un attentat contre le président de la République, Azali Assoumani,  en 2020. Extradé de Madagascar vers les Comores, le 27 janvier 2021, ce prisonnier [ il a été condamné à 8 ans de prison ferme début mars]  n’avait pas donné signe de vie pendant deux mois. Sa situation révélée au grand public par son avocat avait poussé la Cndhl, jugée trop conciliante envers le pouvoir central à sortir de sa zone de confort pour lui rendre visite. Histoire d’éteindre les rumeurs de tortures qui s’étaient répandues.

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