2020 se démarque par une baisse sensible des naissances. Un indicateur à prendre avec des pincettes puisque 2021 pourrait coïncider avec le franchissement de la barre symbolique des 10.000 nouveaux-nés dans le 101ème département. En parallèle, la surmortalité, liée à la pandémie de Covid-19 et à l’épidémie de dengue, explose sur ces deux dernières années. Décryptage avec Bertrand Aumand, le chef du service régional de l’institut national de la statistique et des études économiques (Insee).
Plus grande maternité de France, Mayotte scrute toujours attentivement la publication des chiffres de l’institut national de la statistique et des études économiques (Insee) pour connaître l’évolution des naissances d’une année à l’autre. Idem pour la mortalité. Quoi qu’on en dise, un lien de cause à effet existe bel et bien avec la pandémie de Covid-19 par rapport à ces deux indicateurs. Éléments de réponse.
9.180. C’est le nombre de naissances en 2020. Soit 580 bébés de moins par rapport à 2019 (-6%). Si ce chiffre est le plus faible depuis 2015 (9.000), le taux de fécondite, lui, reste élevé à Mayotte – 4.2 enfants par femme – en comparaison aux autres départements d’Outre-mer (3.6 en Guyane par exemple) et à la métropole (1.8). Ce recul général « concerne davantage » les femmes de l’Union des Comores : 6.300 naissances en 2020, contre 6.810 un an plus tôt (-8%). Toutefois, il faut noter que, comme depuis 2016, trois nouveaux-nés sur quatre proviennent d’une mère de nationalité étrangère (69% de comoriennes et 5% de malgaches).
56. C’est en pourcentage la part des bébés nés en 2020 qui ont au moins un parent français. C’est autant qu’en 2019 et en 2018 (55%), un peu inférieur qu’en 2016 et 2017 (58%) et surtout qu’en 2014 (72%). « Depuis 2015, nous sommes au moins à 40% de père et mère étrangère », rappelle par ailleurs le chef du service régional de l’Insee. Cette inversion notable se justifie notamment par l’explosion d’une immigration massive venue des îles voisines.
415. C’est le nombre d’enfants nés de mères mineures en 2020, contre 430 en 2019 et 470 en 2018. « Le côté positif est que nous avons une tendance à la baisse, cela représente – seulement – 4.5% des naissances sur l’année 2020 (2% à La Réunion, 4.8% en Guyane et 0.4% en métropole, ndlr) », insiste le représentant de l’Insee. Parmi ces mamans âgées de moins de 18 ans, 94% d’entre elles ont accouché dans une maternité.
236. C’est le nombre de mères domiciliées à Mayotte qui ont accouché hors du département (à La Réunion et en métropole). À l’inverse, en 2019, on en comptabilisait 300. Elles ont 32 ans en moyenne et sont de nationalité française pour 86% d’entre elles. Cette « baisse marquée » s’explique par les difficultés de déplacements en raison de la fermeture des frontières durant la crise sanitaire.
6.550. C’est le nombre de naissances au cours des sept premiers mois de 2021, soit 550 de plus que sur la même période de 2020 (+9.1%). « Il n’y a qu’en janvier que les chiffres sont inférieurs puisqu’ils ont été conçus en avril 2020, au début d’un confinement qui a pu décourager les couples de procréer et les inciter à reporter de plusieurs mois leurs projets de parentalité », relativise Bertrand Aumand. Cette tendance « très forte » pourrait bien faire franchir la barre symbolique des 10.000 bébés d’ici la fin de l’année.
970. C’est le nombre de personnes domiciliées à Mayotte qui sont décédées. Une hausse de 25% par rapport à 2019, contre 9% en métropole. Cette surmortalité, visible principalement entre février et mai ainsi qu’en décembre, touche davantage les 75 ans ou plus (+37%). « Le graphique sert à démontrer qu’en fonction du département d’Outre-mer, l’impact n’a pas été à la même période de l’année », souligne le chef du service régional de l’Insee, qui met cette explosion sur le compte du Covid-19 et de la dengue, sans toutefois faire la distinction. « L’agence régionale de santé a des informations sur la cause de mortalité que nous n’avons pas. Nous sommes uniquement destinataires des bulletins de décès. »
610. C’est le nombre de décès recensés de janvier à juin 2021. Une augmentation spectaculaire de l’ordre de 53% par rapport à la même période de 2019, qui frappe essentiellement les personnes âgées (+91% parmi les 75-84 ans au premier semestre, en lien avec la dernière vague épidémique), mais pas que (+65% parmi les 50-64 ans). Autre indicateur : les hommes sont plus touchés que les femmes (+134% contre +61%). « Nous avons une aggravation de la surmortalité en 2021 », conclut Bertrand Aumand.