Violences à Miréréni-Combani : « Nous nous demandons si nous vivons en France ou en Afghanistan »

Depuis un an, les habitants de Miréréni et de Combani ne dorment plus sur leurs deux oreilles et se renvoient constamment la balle face aux actes de violence qui gangrènent les deux villages. Malgré plusieurs tentatives d’apaisement, les pouvoirs publics semblent totalement dépassés par les événements. Au point que la population demande la démission du maire de Tsingoni, Mohamed Bacar.

C’est un énième cri de désespoir que pousse Anziza. « Ce qu’il se passe entre Miréréni et Combani n’est pas un simple fait de délinquance comme on pourrait l’entendre ici et là. » Depuis plus d’un an maintenant, pas un jour ne passe, ou presque, sans que les deux villages ne défraient la chronique. Et que les annonces institutionnelles se multiplient. Mise en place d’un couvre-feu pour interdire la circulation des mineurs la nuit, organisation d’un tournoi de football entre les jeunes pour atténuer les tensions, rencontres d’apaisement et de médiation chez le doyen Rama, à la Maison France Service (pas plus tard que vendredi), à la MJC de Miréréni ou encore à l’école primaire… En vain ! Aucune proposition concrète n’apporte de solutions durables face aux barrages intempestifs et aux actes de violence devenus monnaie courante.

Interrogé sur cette situation inqualifiable, le maire de Tsingoni, Mohamed Bacar, adresse un simple copier-coller de son message posté sur les réseaux sociaux dimanche matin. « La municipalité que je conduis a tout fait pour ramener le calme et la raison, mais ces délinquants ont refusé. […] Nous savons que des adultes, d’un côté comme de l’autre, prennent part à ces conflits et [les] considèrent comme des héros. Ces personnes leur apportent assistance et matériel. » Malgré l’instauration, sur ordre du préfet Thierry Suquet, le 6 septembre dernier, d’un dispositif de sécurité avec la gendarmerie nationale qui a pour objectif d’éviter les drames et d’intervenir rapidement en cas de troubles à l’ordre public, les incivilités continuent encore et encore. « Samedi, ils sont allés exprès à Kahani pour cramer les camions d’un entrepreneur du BTP qui vit à Miréréni », témoigne, sidéré, un habitant qui souhaite garder son anonymat pour des raisons évidentes.

« Le mépris institutionnalisé »

Pis encore, pour traverser Combani, il faut tout simplement présenter sa carte d’identité, sous l’œil des forces de l’ordre. Et en cas de refus ? C’est la fouille du véhicule… Pour s’assurer que des élèves ne se cachent pas dans l’habitacle. « Nous nous demandons si nous vivons en France ou en Afghanistan », s’interroge Anziza. Avant de dénoncer « le mépris institutionnalisé qui règne dans cette commune depuis toujours ». À ses yeux, la population de Miréréni se retrouve paralysée et asphyxiée dans l’optique de maintenir un semblant de vie économique de l’autre côté du pont. « J’ai toujours cru que les gendarmes étaient là pour faire régner l’ordre public, la libre circulation des personnes. Est-ce un mauvais rêve ou un cauchemar ? Je travaille, je paie mes impôts locaux et nationaux pour accepter ça ? Je tiens juste à leur rappeler qu’ils citaient nos jeunes en exemple il y a de cela un an. Aujourd’hui, ils les traitent comme des criminels et des assaillants. »

En guise de bonne foi, Mohamed Bacar assure à nouveau avoir transmis en décembre 2020 la liste des fauteurs de troubles, des marchands de sommeil, et autres financeurs de cette délinquance, au procureur de la République, comme il l’avait fait remarquer en avril dernier. Mais visiblement, le tour de force n’a pas eu l’effet escompté. « Des gens payent des sommes considérables pour faire venir des jeunes de l’extérieur de la commune et semer la terreur », se révolte encore le citoyen. Face à ces constats répétés, une pétition circule depuis quelques heures sur la toile pour exiger la démission de la majorité et de l’opposition du conseil municipal. Une revendication appuyée par le Collectif Mayotte en Sousfrance. « Nous ne lâcherons pas, la liberté, la dignité et le respect sont des droits fondamentaux pour tout être humain. Nous vivons dans le pays de la déclaration des droits de l’Homme. Le temps où les Combaniens pouvaient venir foutre le bordel chez nous est révolu », prévient Anziza, prête à défendre l’honneur de son village, « quoi qu’il en coûte ». Pendant ce temps, les représentants de l’État dénoncent. Encore et toujours…

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