Depuis l’annonce de son décès lundi 30 août 2021, les Mahorais pleurent la perte de leur père, celui appelé affectueusement Papa Marcel ou encore Chef Marcel. Le séna-teur Marcel Henry s’est éteint dans sa demeure de Pamandzi, son lieu de vie depuis toujours. C’est donc tout naturellement que ses obsèques ont eu lieu en Petite-Terre. Des funérailles qui ont mobilisé l’ensemble de la classe politique mais également les habitants venus des quatre coins de l’île pour lui rendre un dernier hommage.
Depuis maintenant trois jour, Mayotte pleure un grand homme qui a œuvré à sa construction. Marcel Henry s’en est allé, laissant une population mahoraise orpheline de ses pères et mères. Il était l’un des derniers combattants de Mayotte française. Celui qui était surnommé « Papa Marcel » manquera à ses proches, mais aussi à beaucoup de Mahorais. Assis devant l’église Saint-Michel de Dzaoudzi, son beau-frère évoque le « calme olympien » de ce fervent défenseur de la départementalisation. « Un homme qui a donné sa vie à Mayotte », décrit-il, teinté d’une émotion plus que palpable. Ce mercredi 1er septembre, plusieurs centaines d’administrés ont afflué des quatre coins de l’île, direction Petite-Terre, pour saluer une dernière fois le tant apprécié sénateur honoraire. À bord d’un des bus affrété spécialement pour l’occasion, une habitante venue de Mronabéja témoigne de sa gratitude à l’égard de cette personnalité publique. « Je savais que c’était quelqu’un qui aimait Mayotte. Sans lui, Mayotte ne serait pas là où elle est maintenant. C’est donc nécessaire que tous les habitants de l’île lui rendent hommage, nous lui devons bien cela. Je viens de loin, mais je devais faire le déplacement », affirme-t-elle.
Comme elle, son voisin de siège a fait toute la route depuis Doujani. S’il n’avait pas noué de liens particuliers ou personnels avec Marcel Henry, il reste admiratif de sa contribution pour le territoire. « C’était important de lui dire adieu et de l’accompagner jusqu’à sa dernière demeure. C’est une manière aussi de le remercier pour tout ce qu’il a fait, son travail, son engagement. Il est une fierté pour sa génération, maintenant la nôtre doit continuer le combat. Ce qu’il a fait hier a donné des résultats aujourd’hui, ce qu’il a fait est visible », déclare-t-il. En ce sens, le prochain défi sera d’assurer le devoir de mémoire selon Farah. « Marcel Henry est une figure à ne pas oublier, à transmettre à nos enfants. Mais malheureusement, les miens ne le connaissaient pas. Lors de sa mort, j’ai dû leur expliquer qui il était. Mais il ne faut pas que cela s’arrête à une simple explication. Nous devons faire con-naitre à nos enfants notre histoire, au-delà même de notre appartenance à la France. Il s’est battu pour notre liberté », rappelle l’habitante de Mamoudzou, avant de revenir avec mélancolie sur les luttes menées par l’homme politique sur l’île aux parfums. « Avec la mort de Marcel Henry, une page se tourne… Nous n’avons plus de personne comme lui aujourd’hui qui combattait avec le cœur et non par égocentrisme ou opportunisme. Il était âgé, son combat était achevé, mais cela rend tout de même nostalgique », déplore-t-elle, avec une pointe d’amertume.
Le conseil départemental se mobilise pour un dernier hommage
Les obsèques du sénateur Marcel Henry devaient être à la hauteur du personnage. Et pour cela, le conseil départemental a mis les petits plats dans les grands pour permettre à tous les Mahorais qui le souhaitent de se rendre aux funérailles. À titre d’exemple, les piétons pouvaient prendre la barge gratuitement, un souhait du Département combiné à la mobilisation des autocars. « Nous avions prévu deux bus de 60 places par commune. C’est la commande qui a été faite auprès des transporteurs, et nous avions aussi des bus censés faire la rotation permanente », précise Ben Issa Ousseni, le président de la collectivité. Pour ce dernier, il était logique et important que le conseil départemental réponde présent. « Nous avons mis en place tout cela parce que Marcel Henry méritait un hommage départemental… Je dirais même un hommage national ! Aujourd’hui, c’est le minimum que le territoire peut faire pour lui », poursuit le chef de l’exécutif. Toutes ces dispositions permettaient à la population de se rendre massivement à l’enterrement du sénateur, et ce fût le cas.
Prise d’assaut, la messe tenue à l’église Saint-Michel n’a pu accueillir en priorité que les membres de sa famille, ses amis et les personnalités politiques et publiques. Celles et ceux qui n’ont pas pu pénétrer dans l’enceinte de l’établissement se sont tout de même recueillis à l’extérieur. Il y avait également foule sous les chapiteaux dressés vers le rond-point de Pamandzi et au cimetière chrétien de Pamandzi. Les Mahorais reconnaissants de l’engagement du sénateur se sont déplacés en masse. Marcel Henry qui s’est éteint un mois avant de souffler sa 95ème bougie repose désormais au cimetière de Pamandzi.
Aéroport Marcel-Henry ? Un souhait sur le point de se réaliser
L’aéroport de Mayotte est-il sur le point de changer de nom ? C’est du moins le souhait du ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, et celui en charge des Transports, Jean-Baptiste Djebbari. Au lendemain de la disparition du sénateur Marcel Henry, le locataire la rue Oudinot a annoncé son intention de faire baptiser l’aéroport de Mayotte qui n’a pas de nom pour l’instant. « Au nom du gouvernement, après avoir échangé avec le président de la République, je peux vous annoncer que cet aéroport portera le nom du sénateur dont on sait qu’on doit tant pour la vie aujourd’hui de Mayotte et pour son avenir institutionnel. C’est la marque du respect et de l’engagement du gouvernement à l’égard de sa mémoire, mais aussi de sa famille », a-t-il indiqué lors de l’inauguration du marché couvert de La-battoir ce mardi 31 août, quelques minutes avant son départ.
Si la décision sera prise à Paris, en concertation avec les élus mahorais, ce souhait ne date pas d’hier. « Ces dernières années, le conseil départemental et des communes avaient demandé à ce que cet aéroport puisse porter le nom de notre regretté sénateur. Ce n’était pas possible jusqu’à présent parce qu’il était toujours de ce monde. Il y a un usage pour l’État de ne pas baptiser le nom d’infrastructure de personnes qui seraient encore en vie », a rappelé le ministre des Outre-mer. Pour l’heure, aucun membre de la classe poli-tique ne s’est opposé à la proposition des ministres, mais Marcel Henry n’est pas le seul candidat. Un autre nom a été suggéré ces dernières années : celui de Abdourahamane Aboudou Moulkandjy. Une figure emblématique de Mayotte, un diplomate et libraire qui a formé l’élite mahoraise et comorienne, y compris le sénateur Marcel Henry. Ses descendants aspire à ce que l’aéroport de Mayotte porte son nom, mais le projet n’a pas abouti jusqu’au bout. Vont-il le relancer à nouveau ? L’avenir très proche nous le dira…