Devenu directeur d’une nouvelle structure expérimentale en faveur de l’insertion des personnes en situation de handicap, Soumaïla-Soula M’Madi a été décoré ce lundi pour son combat pendant la crise sanitaire, en tant que responsable du CCAS de Tsingoni. Une lutte qui n’aura pas été de tout repos pour lui…
La médaille à peine épinglée sur son veston bleu nuit, une ribambelle de colliers de fleurs s’enroulent autour du cou de Soumaïla-Soula M’Madi, sous les rires et les exclamations de ses proches. “On tient notre nouveau président du conseil départemental !”, s’amuse-t-on dans la foule pressée autour de lui. S’il n’est pas (encore ?) élu à la tête de l’Hémicycle, le principal intéressé incline malgré tout la tête avec une grâce modeste. Avant de commencer son discours, tout juste visible sous sa pile de jasmin. “Quand j’ai reçu le texto de mon directeur général, je ne suis pas tombé du canapé, mais presque…”, souffle le nouveau Chevalier avec une émotion palpable.
Depuis son éviction du centre communal d’action sociale de Tsingoni en septembre 2020, celui qui est aujourd’hui directeur de la PPRAP, une plateforme pour l’insertion des personnes en situation de handicap, est en tout cas plutôt bien retombé sur ses pattes. Tellement bien, qu’il recevait ce lundi la médaille de l’Ordre national du mérite, deuxième ordre national après la Légion d’honneur. “Votre parcours est celui d’un honnête homme au sens des Lumières, mais aussi d’un homme honnête”, salue la directrice de l’agence régionale de santé Dominique Voynet, qui lui remettait l’insigne. Une décoration décernée, selon les mots de l’ancienne ministre, pour “ces qualités humaines que l’on ne retrouve pas souvent : l’exigence morale, l’intégrité, le refus des petits arrangements qui travaillent la conscience pendant longtemps, ces défauts qui ruinent la confiance dans la démocratie”.
De la psychologie du travail au CCAS
Parti étudier la psychologie du travail en métropole, Soumaïla Soula M’Madi a d’abord rempli les fonctions de chef de projet pour la politique de la ville de Tsingoni, avant de devenir directeur du CCAS. Un poste qu’il occupait encore l’année dernière, en pleine période de crise sanitaire et de confinement. “Pendant la crise du Covid, j’ai vu de près des hommes et des femmes sortir de leur zone de confort, apprendre de nouveaux métiers, aller au contact des concitoyens pour leur donner des protections, des tests, les sensibiliser aux gestes barrières et répondre aux difficultés énormes d’une partie de la population de Mayotte”, poursuit Dominique Voynet.
Sur le front à Miréréni pour venir en aide aux familles précaires éprouvées par la crise, Soumaïla Soula M’Madi fait partie de ces soldats de la première ligne. Le responsable du CCAS avait mené un combat acharné pour fournir les fameux bons alimentaires, qui avaient fait couler beaucoup d’encre à quelques mois des élections municipales de 2020… “J’ai apprécié l’action de Monsieur Soula, pour leur permettre d’accéder aux aides alimentaires sans passe droit. Un comportement aussi droit conduit à prendre des risques professionnels et personnels”, ajoute la directrice de l’ARS, dans une référence à peine dissimulée à sa démission forcée du CCAS, sur fond de tension avec l’équipe municipale.
Une “reconnaissance nationale”
Un combat qui lui aura finalement été bénéfique. Depuis la fin de l’année dernière, le père de famille s’est vu confier une nouvelle mission, en tant que directeur de la PPRAP. Ce dispositif expérimental sur trois ans, affilié à la fédération APAJH (l’association pour adultes et jeunes handicapés), propose une nouvelle offre de formation à destination des personnes en situation de handicap, pour les accompagner vers l’emploi et l’insertion sociale. Surtout, sa “haute idée de l’intérêt public, de la nécessité de répondre aux besoins des plus précaires et des laissés pour compte”, lui auront valu une “reconnaissance nationale”, avec l’annonce officielle de sa nomination au titre de chevalier de l’Ordre national du mérite. “Ma deuxième grande surprise, cela a été quand j’ai su que la proposition venait de vous”, lance-t-il avec un regard plein de gratitude en direction de la responsable de l’autorité sanitaire. Aujourd’hui, Soumaïla M’Madi Soula entend bien poursuivre son combat avec ce “nouveau cheval de bataille, le handicap”. Et ainsi continuer d’œuvrer pour “une société plus juste, solidaire, inclusive et laïque”.