Le maire Mohamed Bacar a souhaité communiquer sur les mesures prises par son équipe pour ramener l’ordre dans cette commune, en proie à des rivalités chroniques entre deux de ses villages. Mais le tour de force fait plutôt l’effet de réchauffé, faute de moyens concrets.
Décidément, difficile de hisser le drapeau blanc entre Miréréni et Combani. Alors que violences et barrages émaillent depuis des mois les relations entre ces deux villages de la commune de Tsingoni, le maire Mohamed Bacar a souhaité communiquer ce vendredi 16 avril sur les actions que son équipe entend instaurer pour “remettre de l’ordre” et ramener “la paix et la sécurité”. “On se rappelle les événements douloureux survenus dans notre commune et sur le territoire de Mayotte”, a commencé l’élu et nouveau chef des Républicains de Mayotte. “Ces délinquants n’hésitent pas à agresser, voler, et même tuer, même si heureusement pour l’instant nous n’avons pas eu de mort… Mais en mars, nous avons eu des voitures brûlées, des véhicules cassés, nous avons connu des violences assez graves”, a-t-il poursuivi.
Suffisamment graves pour que la commune prenne les choses en main ? C’est en tout cas ce que le maire, accompagné de son chef de la police municipale, Oiladi Djae, et l’avocat de la collectivité, Maître Saidal, a voulu démontrer. Gages de cette volonté de fer : deux documents, envoyés respectivement au procureur de la République et au préfet du département, en date de décembre 2020 et demandant que “ces jeunes soient enfermés définitivement et ce rapidement”. Des listes de noms des auteurs présumés ainsi que des bandes identifiées ont été jointes à ces deux courriers.
En plus de ces signalements, la mairie s’engage à poursuivre tous les délinquants de la commune, mais aussi les personnes qui soutiennent financièrement ou matériellement les délinquants, celles qui hébergent des étrangers en situation irrégulière, et les familles impliquées. “On sait que cette violence n’est pas seulement le fait de délinquants étrangers, ce sont aussi nos enfants, nos frères, la famille doit prendre ses responsabilités. Il n’y aura pas d’état d’âme”, a assené Mohamed Bacar.
Des interdictions déjà interdites par la loi
En pratique, les propositions annoncées ce vendredi ne sont pas franchement nouvelles. Voire sont déjà toutes prévues par les textes. Comme celles de restreindre aux mineurs la détention et la garde des chiens, d’interdire la vente ou la consommation d’alcool sur la voie publique, le port de tout objet pouvant constituer une arme par destination, la diffusion de musique par haut-parleur, le stockage et la vente en détail de produits pétroliers chez le particulier, la vente informelle de marchandises, la mécanique sauvage, la divagation de bétail sur la route…
Reste à savoir quels moyens l’équipe municipale entend concrètement allouer pour atteindre ces beaux objectifs. Car les 15 agents de la police municipale, répartis en trois équipes – deux pour l’intervention rapide et une pour l’environnement et la propreté urbaine – risquent d’avoir du pain sur la planche si elles doivent verbaliser toutes ces infractions et incivilités, dans cette vaste commune de 14.000 habitants.
Des moyens encore limités
Interrogé sur les moyens alloués à ces nombreux chantiers, le maire Mohamed Bacar botte en touche. “C’est une dizaine d’arrêtés que nous avons pris (…). Sur la mise en application, la répression doit se faire avec la gendarmerie, nous avons des réunions mensuelles avec la gendarmerie de Sada. Nous avons notamment mis en place le couvre-feu pour les jeunes à partir de 21h”, a-t-il temporisé, avant que sa conseillère déléguée à la cohésion sociale et politique de la ville, Moina Mohamed, ne vienne à sa rescousse. “Nous avons fait une demande de subvention pour la vidéosurveillance et nous avons demandé un deuxième poste au CLSPD (conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance, ndlr)”, a-t-elle annoncé.
À l’instar de sa voisine de Chirongui, la municipalité du centre entend enfin lutter contre les marchands de sommeil et les constructions d’habitats illégaux et indignes qui seront “recensés et feront prochainement l’objet de procédures de destruction”. Des procédures facilitées depuis la loi Elan qui permet au préfet d’ordonner sans décision de justice la démolition des cases en tôle. Mais qui pourront également passer par l’exécution d’ordonnances du juge, explique Maître Mohamed Saidal. “J’ai déjà obtenu une centaine d’ordonnances pour des collectivités. Le problème c’est que les élus hésitent à les exécuter, pour des raisons politiciennes. Aujourd’hui, c’est fini”, a prévenu l’avocat. Vraiment ?