Du 22 mars au 6 avril se déroule l’élection syndicale des entreprises de moins de 11 salariés. L’opportunité pour les salariés d’être défendus aux Prud’hommes, conseil qui doit voir le jour au 1er janvier 2022, d’améliorer leur condition de travail et de favoriser le dialogue social au niveau des branches professionnelles. Explications avec David Touzel, le directeur adjoint de la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Dieccte), responsable du pôle politique du travail.
Flash Infos : Une semaine après le début de l’élection syndicale des entreprises de moins de 11 salariés, quels sont vos premiers retours ?
David Touzel : Chaque soir, nous sommes tenus informés de l’évolution du nombre de votants. Vendredi dernier, le taux de participation était encore assez faible : 1.25% au niveau national, contre 1.08% à Mayotte. Néanmoins, le territoire se situe dans la fourchette haute par rapport aux autres départements-régions d’Outre-mer. Cette élection concerne tous les salariés des très petites entreprises mais aussi ceux qui travaillent chez les particuliers, notamment les femmes de ménage et les gardes d’enfants, soit un total 2.700 inscrits. Les seuls qui ne votent pas sont ceux du secteur agricole car ils participent à l’élection de la chambre d’agriculture. À titre de comparaison, il y a quatre ans, nous avions eu un taux de participation de l’ordre de 5% à Mayotte et de 7 à 8% à l’échelle nationale.
Il existe deux manières de voter. Soit en renvoyant son bulletin de vote par courrier d’ici le 6 avril, en sachant que les membres du bureau de dépouillement national doivent recevoir le bulletin avant le 12 avril. Donc il ne faut pas traîner ! Soit en passant par le site election-tpe.travail.gouv.fr. Cela prend quelques minutes et c’est très facile d’utilisation. Pour les salariés qui rencontrent des difficultés numériques, ils peuvent directement se présenter à la Dieccte où un poste leur sera mis à disposition.
FI : Pourquoi est-ce si important pour les salariés des TPE de prendre part à cette élection ? Concrètement, qu’est-ce que cela va changer à leur quotidien ?
D. T. : À Mayotte encore plus qu’ailleurs, l’enjeu de cette élection est très important pour trois raisons. Premièrement, elle va servir pour la désignation des conseillers prud’hommes, qui doivent être mis en place sur le territoire à partir du 1er janvier 2022. Avant le renouvellement général prévu en 2023 auquel le 101ème département va participer. Or, à cette occasion, le taux d’audience à l’élection TPE en cours va être pris en compte pour désigner les conseillers prud’hommes. C’est primordial car ce sont des juges salariés locaux qui sont désignés. Jusqu’à présent, nous avions un tribunal du travail pour gérer les litiges. Dans le monde du travail, le conseil des prud’hommes est une juridiction énormément saisie.
Deuxièmement, elle va grandement jouer dans la négociation des conventions collectives. Encore une fois, le taux d’audience sera pris en compte pour déterminer la représentativité des syndicats dans la branche professionnelle, les seuls habilités à négocier localement, dans le BTP ou l’hôtellerie-restauration par exemple. Cette élection est d’autant plus importante que la convention collective de branche est le seul moyen pour les salariés des TPE d’obtenir des conditions de travail plus favorables. En temps normal, la négociation syndicale n’existe pas ou très peu dans les entreprises de moins de 11 employés car elle n’est pas prévue par la loi.
Troisièmement, elle va permettre la mise en place de commissions paritaires régionales interprofessionnelles, composées de dix représentants salariés et de dix représentants employeurs à Mayotte. Leurs objectifs consistent à donner des conseils et des positionnements en termes de droit du travail, d’emploi, etc. Et ainsi résoudre un différend entre les deux parties, sans forcément passer par la case prud’hommes.
FI : Pouvons-nous dire que Mayotte rentre un peu plus dans le droit commun avec cette élection syndicale de 2021 ?
D. T. : Le tribunal du travail relevait de l’ancien code… Avec les prud’hommes, le modèle de justice français pour le contentieux du contrat de travail, il y aura une parité employeur-salarié. À ce niveau-là, Mayotte va rentrer un peu plus dans le droit commun ! D’où le travail en amont pour trouver les locaux adaptés et former les conseillers prud’hommes. Nous essayons de les préparer au mieux à ces fonctions qui les attendent et qui était une demande très forte des partenaires sociaux. Pour que les organisations syndicales puissent défendre leurs droits, il faut que les salariés des TPE se mobilisent en masse et leur apportent une légitimité.