Cela fait cinq semaines que les élèves de Mayotte suivent leurs cours uniquement à distance. La levée du confinement signifie un retour à l’école, mais non sans quelques précautions. Le rectorat met les bouchées doubles pour que les établissements scolaires ne soient pas le théâtre de clusters. Pour cela, 350.000 masques ont été fournis aux collèges et lycées, ainsi qu’aux écoles même si ces dernières sont gérées par les municipalités. Pour cette rentrée, les mesures sont plus strictes et quelques nouveautés font leur apparition.
Flash Infos : Quel bilan faites-vous des cinq semaines de confinement dans l’Éducation nationale à Mayotte ?
Gilles Halbout : En réalité, cela a été trois semaines de cours à distance et deux semaines de vacances. Pendant les trois semaines de cours, nous avons tout fait pour garder le lien avec les élèves, et globalement nous ne l’avons pas trop perdu, notamment chez les petits. Chez les plus grands, c’était plus compliqué parce que ce sont des adolescents, voire des jeunes adultes, plus difficiles à tenir. Mais en moyenne, nous n’arrivions pas à joindre facilement 5% des élèves. Par ailleurs, les retours sont plutôt bons : d’après les échos que nous avons, en tout cas au niveau des collèges et lycées, les plus autonomes ont su tenir la distance et ont continué à venir chercher les cours polycopiés.
Je tiens à saluer la pédagogie et la qualité du travail des enseignants. Mais le plus compliqué était de motiver ceux qui étaient en train de décrocher, car il n’y avait plus l’obligation de se rendre à l’école. Nous en avons donc perdus davantage par rapport aux petits, surtout dans les filières professionnelles : la formation à distance est moins motivante pour eux. Alors pendant les vacances, nous avons fait revenir les apprentis dans beaucoup de lycées et cela a très bien marché. Il y a eu beaucoup d’affluence dans tous les établissements concernés. Je ne dis pas qu’en deux semaines, nous avons rattrapé le retard accumulé. Mais nous avons limité la casse. Et il y a aussi eu des ateliers pour les petits dans certaines écoles.
FI : Les élèves vont-ils être soumis au système de rotation comme ce fut le cas après le premier confinement ?
G. H. : Les quatrièmes, troisièmes, les secondes et les terminales vont venir un jour sur deux. Les autres classes ne sont pas concernées, car le travail en autonomie est moins simple pour les sixièmes et cinquièmes. Et les élèves de terminale doivent préparer le bac et le grand oral, donc ils ont besoin d’avoir des cours en présentiel. Il en ira de même pour les BTS. Ce système de jauge réduite sera applicable pendant deux semaines. Nous nous inscrivons dans la même dynamique de desserrement des contraintes que le préfet. Si au bout des deux semaines, la situation va mieux, cette mesure ne sera ensuite maintenue que dans les établissements où nous constatons une grande circulation du virus.
FI : Comment saurez-vous s’il y a une grande circulation ou pas ?
G. H. : Nous allons continuer les campagnes massives de tests selon trois critères : le nombre d’élèves positifs ; le nombre anormalement élevé d’élèves absents ; ou encore si l’ARS nous informe avoir repéré des signaux d’une forte circulation du virus dans la zone d’un établissement. Dans ce cas là, nous ferons tout de suite une campagne de test, et, en fonction des résultats, nous maintiendrons la jauge réduite ou pas.
FI : Quels autres dispositifs allez-vous mettre en place pour cette rentrée ?
G. H. : Il y a un changement majeur. Avant, nous fermions une classe à partir de trois cas. Ce sera désormais chose faite à partir d’un cas positif. C’est une mesure de prudence car nous partons du principe qu’à Mayotte, le virus sud-africain circule principalement. Or, il est particulièrement contagieux ! Donc si un élève est contaminé, il y en a sûrement quelques-uns qui le sont aussi.
Nous allons également renforcer le respect des gestes barrières, grâce à des services civiques. Ils ont été formés à cet effet. Ils pourront aller voir ce qu’il se passe dans les cours de récréation et à l’entrée des établissements. Ils peuvent aussi vérifier le nettoyage des mains des élèves, et l’entretien des classes. Nous avons aussi créé une adresse mail générique où l’on peut directement contacter le rectorat pour signaler un mauvais fonctionnement, ce qui nous permet d’agir très rapidement. Enfin, nous avons mis en place au rectorat une équipe opérationnelle qui assure le suivi des cas contacts, pour organiser les campagnes de tests et réceptionner toutes les alertes afin de les traiter.
FI : Nous avons vu les tests salivaires arriver dans certains établissements scolaires de l’hexagone, est-ce que nous pouvons espérer la même chose à Mayotte ?
G. H. : Ils vont arriver, il n’y a pas de souci et nous communiquerons à ce sujet. Mais, attention, ces tests sont des PCR et non des antigéniques. Cela signifie qu’il faut attendre les résultats entre 24h à 48h, et nous ne sommes pas maîtres de la chaîne, parce que cela passe par plusieurs intermédiaires. Entre le moment où il y a un signalement et celui où nous déployons la campagne de test, il se passe au moins 24h. Ensuite, il faut attendre les résultats. C’est-à-dire qu’entre le moment du signalement et celui où nous devons prendre une décision, il s’est peut-être passé trois jours. Dans notre politique de réactivité, ce n’est pas satisfaisant. Nous aurons donc toujours nos tests antigéniques. D’autant plus que dans notre académie, il n’y a pas beaucoup de réticence, contrairement à d’autres.