{xtypo_dropcap}M{/xtypo_dropcap}ardi matin, l’ambiance était studieuse à l’hôtel Trévani. Michel Menguy, du cabinet Access conseil et intervenant pour l’Institut national des études territoriales (Inet) de Strasbourg et Nicole Chambron, sociologue du Centre européen de recherche et de formation (Cerf) demandent à leurs 18 stagiaires quel est le contenu d’une note de cadrage d’un projet stratégique. Tous lancent au vol des propositions qui sont aussitôt retranscrites sur document Power point.

Durant une semaine, les 18 directeurs de services ont suivi le quatrième module d’un cycle de formation en management stratégique dispensé par l’Inet, en collaboration avec la délégation de Mayotte du CNFPT. Cette semaine a été consacrée à la manière de piloter les projets structurants d’une collectivité.

“Il y a deux modes de projets. Les classiques qui sont organisés de manière hiérarchique dans lequel les tâches sont clarifiées et répétitives. C’est le cas notamment d’un service de l’état civil. Il y a un autre mode, celui que nous appelons "mode projet". Ce dernier implique une transversalité, un travail à plusieurs partenaires, on accepte une zone d’incertitude en fonctionnant par essais et corrections en cas d’échec. C’est plus le cas dans la politique de la ville, l’aménagement ou la cohésion sociale”, explique Alain Strève, responsable du pôle compétence management stratégique de l’Inet.

Cette formation était attendue aussi bien par les Mahorais que les Réunionnais. “Je travaille depuis quinze ans à la ville de Saint-Denis et j’y suis DGS depuis un an. Cette formation nous permet d’avoir une vision transversale des services, de nous remettre en cause et elle nous apporte une boîte à outils que l’on utilisera selon les stratégies de développement de notre collectivité. De plus, échanger avec nos collègues mahorais nous permet de voir qu’on peut parfois faire des choses avec peu de moyens”, affirme Jean-Pierre Mondon, qui est à la tête d’une collectivité de 143.000 habitants et dotée d’un budget de 250 millions d’euros.

 

La culture du mode hiérarchique fait place à celle du mode transversal

 

Pour Thoihir Youssouffa, DGA des services à la population du conseil général, cette formation de haut niveau est une opportunité à saisir pour les cadres supérieurs mahorais des collectivités locales. “J’espère que cette expérience sera reconduite. Mayotte entre dans une nouvelle phase de développement avec la départementalisation et la rupéïsation et les cadres mahorais ont besoin de formation pour la mise en œuvre de nouvelles politiques.”

Les stagiaires des deux îles se félicitent de la dimension régionale de la formation. Celle-ci permet de se tisser un réseau de connaissances et d’échanger les manières de fonctionner pour mieux faire avancer les projets.

“On retrouve beaucoup de problématiques identiques à l’Hexagone, notamment la difficulté à “casser” le mode hiérarchique pour un mode plus transversal de management des projets. Il y a une très forte demande à la Réunion et à Mayotte pour développer des projets en cohérence avec la commande politique. Pour Mayotte, cette formation tombe au bon moment puisqu’il y a des enjeux importants et Mayotte a besoin de projets structurants. Si Mayotte est capable de mettre en place des projets et de les manager correctement, elle réussira. Le financement n’est pas tout, il y a des collectivités riches qui ne voient pas leurs projets aboutir parce qu’il a été mal géré”, indique Michel Menguy.

Un cinquième module attend encore les stagiaires avant qu’ils ne passent au cas pratique et exposent leurs conclusions pour une évaluation finale en septembre prochain.

 

Faïd Souhaïli

 


DGS, un métier compliqué

“Le métier de directeur général des services évolue et devient plus complexe”, affirme Alain Strève, responsable du pôle compétence management stratégique de l’Inet. C’est d’autant plus compliqué pour un DG de la Réunion ou de Mayotte car les possibilités d’échanges sont limitées dans un contexte insulaire et que les relations avec les élus sont elles aussi parfois difficiles.

“On leur demande plus, avec moins de moyens. Sur les 5 administrateurs territoriaux que compte Mayotte, 3 ont changé de poste à l’issue des élections de 2008. Mais c’est le métier qui veut ça puisque dans l’Hexagone, 75% des DG changent de poste après une élection”, renchérit Jérémy Blasquez, directeur de la délégation de Mayotte du CNFPT.

Celui-ci rajoute que la formation entreprise à Mayotte (2 modules) et à la Réunion (3 modules) a permis de faire baisser considérablement le prix de la formation (1.000 € par semaine et par personne) en comparaison d’un séjour à l’Inet à Strasbourg ou d’une formation privée (1.500 € par personne et par jour).

Le cycle de formation comprend 5 modules de 5 jours : enjeux des services publics; mise en place d’une politique publique et son évaluation; les choix organisationnels; piloter les projets structurants et le rapport aux équipes.

 

Les stagiaires mahorais

Abdou-Razak Mohamed “Biko” (DGS, Mamoudzou), Nabilou Ali Bacar (directeur du conseil économique et social de Mayotte), Thoihir Youssouffa (DGA services à la population, CG), Amir Ahmed (DGA infrastructures, CG), Antuat Abdourroihmane (DGA formation, CG), Hatubou Antoy (DGS, Sictom Nord), Mouridi Bina (DGA relations avec les collectivités territoriales, CG), Ahamada Haribou (DGA finances, Koungou).