{xtypo_dropcap}A{/xtypo_dropcap}u CHM, on lui a dit qu'il n'y avait pas de budget pour un poste de diététicienne. Sandra Charriere a donc ouvert son cabinet, et officie depuis mi-janvier derrière la rue du Commerce, dans les locaux du cabinet de kinésithérapie. Arrivée sur l'île en juillet, la jeune femme, qui exerce depuis 10 ans, a d'abord pris le temps de s'informer sur la culture alimentaire locale, "pour adapter mes conseils à la réalité, proposer des choses possibles ici au lieu de plaquer des recommandations de Métropole".
Un temps libre qui lui a également permis de travailler bénévolement pour le club des familles de jeunes diabétiques, avec qui elle a animé un atelier au mois d'octobre pour apprendre à ces enfants à comptabiliser les sucres et les graisses dans les plats mahorais.
Au cabinet, elle reçoit souvent des patients envoyés par les médecins généralistes. Diabétiques, personnes en surpoids, femmes enceintes ou qui allaitent, grands sportifs, personnes âgées, hommes, femmes, Mahorais, Métropolitains, sa clientèle est variée et s'acquitte d'une somme qu'elle veut le plus bas possible, attendu que la Sécurité sociale ne prend pas en charge ses consultations, "d'où l'importance de créer un poste de diététicien à l'hôpital".
Elle-même spécialisée dans le diabète, et après avoir vu les résultats de l'étude Madya, Sandra Charriere estime qu'il faudrait même trois diététiciens au CHM, et précise que les services de pédiatrie, de la maternité et d'oncologie en ont fait la demande. "Le premier traitement du diabète est la diététique. De plus, le diabète, l'obésité et la malnutrition sont des priorités nationales, et ici rien n'est fait."
Diététique ne veut pas dire privation
La jeune femme est également spécialisée en éducation thérapeutique, une pratique de l'information nutritionnelle qui part du patient et de ses spécificités pour formuler des conseils adaptés. Une pratique qui est désormais reconnue et censée être mise en place dans tous les hôpitaux. Côté conseils justement, une règle importante : diététique ne veut pas dire privation.
"Il est important que le régime conseillé soit adapté à la personne, à ses goûts et ses besoins, sinon ça ne peut fonctionner durablement. Régime ne veut pas dire privation totale de sucre et d'alcool par exemple. Contrairement à ce qui se dit, on peut parfaitement manger des féculents à tous les repas, c'est mieux que de se jeter sur un paquet de gâteaux parce qu'on n'a pas assez mangé à midi. Il faut par contre surveiller les quantités et la façon dont ils sont cuisinés, et tacher de varier au maximum."
Sandra Charriere ne déconseille pas les traditionnels brochettes, fruits à pain, maniocs, bananes, mais préconise de les cuisiner en ragouts, soit à l'eau et non frits dans l'huile. Pour palier le manque de fruits et légumes que l'on connait en cette saison, elle recommande des brèdes, tomates et concombres si possible, et des bananes lorsqu'il n'y a pas d'autres fruits.
"Les fruits ne font pas partie des habitudes de nutrition ici, c'est pourquoi j'insiste dessus." Il existe d'ailleurs à Mayotte une maladie appelée le béribéri, qui vient d'une carence en vitamine B, que l'on trouve justement dans les céréales, les fruits et les légumes. La surconsommation de sodas, d'alcool, de chips et autres grignotages entraine à terme du surpoids et du diabète, d'autant que les Mahorais ont un terrain génétique favorable au diabète.
Pour prévenir ce fléau, Sandra Charriere recommande avant tout de l'information, à la fois auprès des professionnels de santé afin qu'ils puissent intervenir auprès de leurs patients diabétiques – elle donne d'ailleurs des cours à l'école d'infirmière – et auprès de la population en uniformisant le message pour éviter que trop de discours différents se parasitent entre eux.
Hélène Ferkatadji
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