Ce mardi, le conseil représentatif des musulmans de Mayotte (CREMM) a approuvé et surtout adopté les nouvelles mesures restrictives prises par la préfecture. Si le conseil cadial veille à l’application des fermetures des 330 lieux de culte, les commerçants font le forcing pour ouvrir par tous les moyens.
Le communiqué de la préfecture de Mayotte paru lundi après-midi réclamant la fermeture des lieux de culte et des marchés a fait bondir les vendeuses de fruits et légumes du marché de Mamoudzou. Une phrase en particulier : « Ces mesures sont applicables dès aujourd’hui, sur l’ensemble du territoire, et ce pour une durée de 15 jours, soit jusqu’au lundi 15 février… » « Les fruits et légumes ne sont pas des produits qu’on peut conserver« , s’emporte Amina devant son espace de vente. « En métropole ou ailleurs au moins, on leur laisse quelques jours le temps de s’organiser et d’écouler un maximum de produits. Ici, la préfecture nous dit, « vous vous débrouillez avec vos marchandises, mais vous fermez et maintenant !« , c’est incroyable ! »
La marchande vient de regagner sa place, quelques peu rassurée. Cinq minutes auparavant dans une réunion improvisée, on venait de lui annoncer que le marché de Mamoudzou devrait rester ouvert. La Chambre de commerce et d’industrie (CCI), responsable des lieux, a en effet sollicité une dérogation, comme la préfecture le lui permet « si les conditions de leur organisation ainsi que les contrôles mis en place permettent de garantir le respect des règles de distanciation et la prévention de regroupements de plus de six personnes« , dixit le communiqué.
Le marché de Mamoudzou épargné ?
C’est Madi Djoumoi, lui-même commerçant au marché de Mamoudzou, qui a apporté la bonne nouvelle. « Ici, nous avons largement les moyens de remplir les conditions imposées par la préfecture. Mais ça demandera la participation et la vigilance de nous tous« , prévient-il face aux commerçantes. L’éphémère porte-parole des commerçants du marché de Mamoudzou a précisément visé celles et ceux qui étendent leurs produits au-delà de leur espace de vente, sur l’allée dédiée à la circulation des clients, réduisant ainsi l’espace de circulation et obstruant au respect des règles de distanciation.
« Moi je vous surveillerai toutes ! La première qui ne respecte pas les conditions, je monte à la Chambre et je vais la dénoncer ! Il est hors de question qu’on m’empêche de travailler et que je paye pour les erreurs d’une autre« , menace haut et fort une autre marchande, chaleureusement ovationnée par ses pairs. Les entrées principales du marché de Mamoudzou étaient ainsi grandes ouvertes ce mardi, au lendemain du communiqué préfectoral, et devraient a priori le rester pour les jours à venir. Nul doute que la préfecture, par le biais de la Direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DAAF), à qui il a été demandé d’adresser les dérogations, continuera d’être sollicitée pour permettre aux commerçants de continuer à exercer.
330 mosquées fermées du jour au lendemain
De dérogations, il n’en est aujourd’hui pas question pour les lieux de culte. Le conseil cadial a immédiatement fait adopter les nouvelles mesures restrictives aux 330 mosquées de l’île. Suspendues les écoles coraniques et les prières communes : la préfecture et le conseil cadial appliquent strictement les consignes de fermeture, au point même d’interdire l’appel à la prière par un muezzin. « C’est la position du conseil cadial, l’autorité religieuse. On se doit de la respecter« , affirme Anouoiri Chanfi, chef de service études et partenariat au conseil cadial.
Un message reçu cinq sur cinq par le conseil représentatif des musulmans de Mayotte (CREMM). Le représentant du conseil cadial admet que la nouvelle n’a pas été bien accueilli partout et que les questions ont fusé de la part de certains responsables de mosquées. Mais il considère que tout peut se régler par l’échange et le dialogue. « Il y a des responsables de lieux de culte qui ne comprennent pas, et qui veulent avoir plus de précisions. Ils s’interrogent et s’inquiètent surtout, parce que tout le monde n’a pas la même lecture de l’islam. Le conseil cadial est là pour échanger avec eux et apporter des réponses à leurs interrogations. C’est ce que nous avons fait et c’est pourquoi, même s’il peut y avoir des divergences d’opinions, la grande majorité a suivi nos conseils et fait fermer les lieux de culte« , soutient Anouoir Chanfi.
Les nouvelles mesures mises en place par la préfecture de Mayotte et le conseil cadial pour lutter contre la propagation du virus font suite aux derniers chiffres inquiétants de l’évolution du virus, indiquant une augmentation du taux de positivité (de 14,7% à 16,9%) et du taux d’incidence (de 287,7 à 404 pour 100.000 habitants). Des mesures qui ne laissent présager rien de bon pour Mayotte et les Mahorais…