Les habitants de Dzoumogné ont assisté à un déferlement de violences ce mardi 24 novembre. Tout au long de la journée des bandes rivales se sont affrontées dans le village, terrorisant les habitants. Les différentes forces de l’ordre déployées sur les lieux ont dû faire face à des jeunes tenaces qui n’ont pas baissé les armes.
“On vient d’être attaqués. Je tremble, j’ai peur.” Ces mots sont ceux de Nanou, habitante de Dzoumogné. Impuissante, elle assiste aux actes de violences qui ont rythmé son village. Elle a également été blessée alors qu’elle avait son fils de deux ans dans les bras. “Mon frère était dehors, un groupe de jeunes, armés de machettes et pierres, l’ont appelé et lui ont demandé de s’arrêter. Ils lui ont dit qu’ils allaient le tuer. Il s’est alors mis à courir pour se réfugier dans notre cour. Je suis sorti à ce moment là pour voir ce qu’il se passait et j’ai reçu une pierre alors que j’avais mon bébé avec moi”, détaille-t-elle, encore traumatisée. La jeune maman décide de mettre son fils en sécurité puis sort pour constater les dégâts. Elle est surprise de voir son quartier complètement encerclé par les gendarmes et les délinquants.
Les uns lancent des pierres alors que les autres leur répondent par des bombes lacrymogènes pour les dissiper. Ces affrontements, qui ont duré une bonne partie de la journée, bloquent tout le village. Impossible d’y entrer ou d’en sortir… Une situation pénalisante pour les travailleurs. “Je voulais juste aller travailler de l’autre côté, mais quand je suis arrivé au niveau du pont, j’ai vu ces gamins mettre le feu. J’ai alors rebroussé chemin”, raconter Batrolo, un entrepreneur. Si la plupart des automobilistes ont fait demi-tour pour rentrer chez eux, les plus courageux ont emprunté la grande boucle pour se rendre sur le lieu de leur activité professionnelle. À l’instar de Batrolo qui risquait de perdre une journée de travail. Ce dernier est en colère face à cette situation qui devient la norme à Mayotte. “Ces jeunes bloquent tout, l’économie en pâtit, nos entreprises en font les frais. Je ressens du désarroi car cette violence est devenue une banalité chez nous.”
Des raisons encore floues
Les habitants de Dzoumogné semblent être convaincus, ces affrontements ont dégénéré car des jeunes de la ville chef-lieu se seraient déplacés jusque dans leur village pour affronter ceux de chez eux. Une information confirmée par la marie de Bandraboua. “Je peux vous assurer que ce sont des gamins de Kaweni qui sont venus régler leurs comptes, et ils ont été aidés par les élèves du lycée de Dzoumogné. Mais ils avaient leur cible, ils voulaient le groupe de délinquants de Dzoumogné”, affirme Daoud Sadjaye, adjoint au maire, chargé de la sécurité publique de la commune. Toujours selon l’élu, ce groupe en question terroriserait les lycéens et racketterait souvent la population.
Serait-ce donc une histoire de vengeance ? La gendarmerie nationale se montre plus prudente sur les raisons qui ont motivé cette confrontation. “Nous ne pouvons pas confirmer ces rumeurs. Dzoumogné est un secteur où nous n’avons pas beaucoup d’informations de la part de la population. Mais une chose est sûre, il y avait bien des jeunes de Dzoumogné”, précise le capitaine Dépit de la gendarmerie. Quoi qu’il en soit, ces délinquants sont connus des services de polices. Une situation qui agace davantage l’adjoint au maire. “Nous avons fait plusieurs démarches auprès de la gendarmerie de M’tsamboro. Nous avons envoyé leurs noms et leurs adresses mais rien ne bouge. Même la préfecture est au courant parce que nous avons envoyé des rapports. Il est temps que le préfet réagisse”, s’indigne Daoud Soudjaye.
Selon la mairie et la population, un blessé est à déplorer du côté des jeunes qui combattaient contre les gendarmes. “Il a été blessé à la tête, il y a du sang partout”, indique Nanou. “C’est le leader, il a été évacué à l’hôpital de Mamoudzou”, précise Daoud Soudjaye. Encore une fois, la gendarmerie ne confirme pas, par manque d’éléments.
Des jeunes prêts à en découdre coûte que coûte
Quatre personnes ont été interpellées : trois mineurs et un majeur. Entre 60 et 70 effectifs de la gendarmerie ont été déployés sur les lieux ainsi que l’hélicoptère de la gendarmerie et un véhicule blindé. À cela s’ajoutent “des éléments de l’antenne GIGN et du PSIG de Koungou”, précise le préfet dans un communiqué. Sur place, les forces de l’ordre ont dû faire face à des bandes déterminées, prêts à tout pour en découdre avec eux. “Les jeunes se divisent en petits groupes pour mettre des barrages sur les routes ou mettre le feu. Ils sont très vifs et nous ont compliqué la tâche”, indique le capitaine Dépit. Si tous les élèves ont été retenus dans les établissements scolaires, il a été difficile de contenir les lycéens qui voulaient participer aux événements. La sortie des cours à 17h était donc redoutée par les autorités. La gendarmerie a alors déployé toutes ses forces pour qu’il n’y ait pas plus de dégâts. Cependant, un bus a été caillassé, alors que les militaires étaient encore sur le terrain. Fort heureusement, cet acte n’a pas engendré de blessés…
Désormais, la ville, la préfecture et les forces de l’ordre doivent mettre en place une stratégie pour assurer la sécurité des élèves et des habitants. “C’est un conflit qui concerne le milieu scolaire, alors nous allons mettre des dispositifs au moins jusqu’à vendredi aux abords du lycée de Dzoumogné”, annonce le capitaine Dépit. Il ne reste plus qu’à espérer que cette mesure aura l’effet escompté et que d’autres évènements de ce type n’obligeront pas la gendarmerie à diviser son dispositif.
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