Les agents de terrain du conseil départemental réclament plus de moyens pour assurer leur sécurité et leurs conditions de travail. Le syndicat Force ouvrière appelle à la grève à partir de ce lundi, 7h.
L’histoire avait fait le tour de l’île. Un vendredi soir de juillet à Saziley, Mohamed Ali était sauvagement agressé par des braconniers pendant un bivouac organisé par Les Naturalistes. Ce garde tortue du conseil départemental, partenaire de Sea Shepherd et président de l’association de sécurité villageoise de M’tsamoudou (ASVM), blessé à la tête et inconscient, sera alors évacué à l’hôpital. Et pendant qu’une marche s’organisait en soutien à la victime et à sa famille, l’affaire provoquait aussi un petit séisme entre les quatre murs du conseil départemental. Pour les agents de terrain de la collectivité, confrontés quotidiennement aux problématiques de sécurité et à des conditions de travail difficiles, c’était un peu la goutte d’eau. Un ras-le-bol qui les conduit aujourd’hui à se mettre en grève. “Ces agents sont particulièrement exposés au climat d’insécurité que nous constatons aujourd’hui… Ils vont au boulot la boule au ventre”, décrit Ichaan Madi, la secrétaire générale du groupement départemental Force Ouvrière services publics, qui porte aujourd’hui leurs revendications.
C’est donc à l’appel du syndicat, majoritaire au sein des instances du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), du comité technique et des commissions administratives paritaires (CAP), qu’une partie des agents de terrain, parmi lesquels les personnels en charge du ménage, les gardiens et agents de surveillance, les agents de surveillance des tortues, les jardiniers et les agents de la brigade rivière, se mobilise à partir de ce lundi. Au coeur de leurs revendications, donc : la sécurité. “Quelques jours après l’agression, ils ont enfin obtenu les casques qu’ils réclamaient depuis longtemps, alors qu’on leur avait toujours rétorqué qu’il n’y avait pas les moyens”, retrace la représentante syndicale.
Le local, seule échappatoire face aux braconniers
Plus de matériel, mais aussi des meilleurs locaux figurent en tête de leurs réclamations. En effet, le local de Moya doit être détruit dans quelques jours dans l’optique d’en construire un nouveau. Mais “rien n’a été prévu entre temps pour que les agents puissent déposer leurs affaires et continuer leur mission”, dénonce Mouslimou Maouard, secrétaire général du syndicat au conseil départemental. Or ce local est aussi souvent leur seule solution de repli face à des braconniers, armés de machette. Autre cause de leur colère : l’absence de régularisation de leur situation administrative. “Anciens jardiniers, les gardes tortues n’ont pas vu leur intitulé de poste changer, donc ils ont le même salaire, sans prime pour le travail de nuit ou le risque”, abonde encore Ichaan Madi.
Dialogue rompu
D’une manière générale, les agents de terrain ont décidé de mener cette action collectivement pour réclamer une meilleure prise en compte de leur travail par leur direction, qu’ils jugent trop souvent au mieux absente, au pire carrément méprisante. Défauts de management, critiques acerbes, voire insultes… Le dialogue semble parfois impossible avec leurs directeurs. Sans forcément demander des départs, les agents attendent “au moins qu’ils soient à l’écoute”, explique Ichaan Madi. “Sauf pour les femmes de ménage. Elles insistent pour que leur directrice change de poste.”
Sortie de crise rapide ?
Parmi les autres revendications des grévistes, l’on retiendra aussi la question de la prime Covid, car certains agents n’ont pas arrêté de travailler pendant le confinement, ou bien ont été rapidement rappelés. “Nous voulons voir la liste des bénéficiaires pour vérifier que tout est bon”, indique Mouslimou Madi. Ou encore celles de l’indemnisation en cas d’accident ou d’attaques pendant l’exercice de leurs missions, des réunions plus régulières du CHSCT, surtout en cas d’incident comme celui de Saziley, de nouveaux locaux pour les jardiniers, et une meilleure sécurisation des bâtiments pour les gardiens. “La majorité des sites sont de vraies passoires, et parfois les effectifs ne sont pas suffisants pour être en binôme, alors que la réglementation l’exige”, développe Ichaan Madi.
Pour l’instant, le syndicat a pu se réunir une première fois jeudi avec les directions concernées, les responsables des ressources humaines et de la médiation, et la vice-présidente du conseil départemental, chargée de l’administration générale, des infrastructures et des transports, Fatima Souffou. Si certaines revendications ont été entendues, d’autres restent en suspens et les agents confirmaient à l’issue de cette rencontre leur intention de faire grève à partir de ce lundi, 7h. Résultat : le Département devra compter sans certains bras précieux pour surveiller les plages, entretenir les espaces et sécuriser sites et rivières… Une situation qui n’est dans l’intérêt de personne. Contactée, la vice-présidente Fatima Souffou se garde de tout commentaire. “Ils sont en fin de mandat, ils nous ont contacté vite à partir du préavis de grève. Ils n’ont pas vraiment intérêt à ce que cette affaire s’envenime”, fait valoir Ichaan Madi. Optimiste.
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