C’est dans un élan de jovialité qu’hier, Gilles Halbout, recteur de la région académique de Mayotte, a lancé sa campagne d’inspection des écoles dans les zones non-urbaines. La tournée a commencé dans la commune de Chirongui aux cotés du maire et de son escouade. Au programme ? La visite des écoles élémentaires et maternelles de Mramadoudou puis de Poroani. L’objectif était d’écouter les doléances des élus, du personnel enseignant et de faire un état des lieux de cette rentrée scolaire placée sous le signe de la Covid.
8h30. Posté devant l’hôtel de ville de Chirongui, le maire Andhanouni Saïd, accompagné de son équipe, accueille le recteur les bras grands ouverts. Celui-ci, à peine descendu de son carrosse ministériel, annonce gaiement sous masque : « Vous êtes la première commune non-urbaine que je visite. Vous êtes les chouchous. » Après de brèves salutations, s’ensuit dès 8h40 une réunion entre les élus et le recteur dans la salle de conférence de la mairie. Au cœur de la discussion ? Les difficultés que rencontre la municipalité notamment au niveau de la sécurité et aux problèmes d’effectifs. Même si la rentrée s’est déroulée dans de bonnes conditions, les élus craignent pour les jours à venir. « Nous avons besoin d’effectifs, il n’y a pas assez de place. La liste d’attente est remplie. Comment faire ? Nous vous demandons de l’aide car le rectorat a promis de participer à la construction des écoles », adresse au recteur Tahamida Ibrahim, l’adjointe au maire chargée de la scolarité et de la formation.
« Il y a urgence dans l’urgence », réplique Gilles Halbout. « Dans la continuité du plan annoncé par le président de la République, nous allons construire 800 salles de classes. Je m’engage à passer à la vitesse supérieure. L’épidémie a ralenti les choses », promet-il. Le recteur tient à rassurer les établissements en ce qui concerne la capacité d’accueil : « Il ne faut pas que cette question vienne dégrader tout le système scolaire, tout ce qui a déjà été fait. Donc il faut se projeter dans la durée car avec les locaux que nous avons actuellement, il est impossible d’accueillir tous les enfants. » Le rectorat propose de s’adapter, prendre des mesures alternatives pour acheminer cette année scolaire et préparer la rentrée 2021. « Le premier objectif est d’accueillir toutes les grandes sections. Ensuite, de prendre entre deux tiers à trois quarts des moyennes sections. Puis de faire venir la moitié des petites sections », réclame Gilles Halbout. Pour la question de la sécurisation des abords, « les infrastructures seront renforcées avec l’engagement de mon ministère ».
« C’est un modèle ! »
9h20. Fin de la réunion. Tout le groupe se mobilise en direction de l’école Said Vitta à Mramadoudou. Le recteur constate l’installation des points d’eau et les travaux en cours concernant une aire de jeu. Puis une visite éclair s’effectue à la demande du maire vers l’école maternelle située aux abords de l’élémentaire. 9h40. Le temps presse. Gilles Halbout est attendu à Sada pour 10h. L’escadron poursuit sa campagne à l’école maternelle de Poroani. Le recteur aperçoit le chantier du parcours de motricité pour les enfants et visite l’emplacement du futur dortoir, un projet qui tient à cœur à la municipalité. « Nous rencontrons un problème d’absentéisme les après-midis. Lorsque les parents viennent récupérer leurs enfants à 10h, ils ne reviennent plus car l’école est excentrée du village. Le trajet et la fatigue en sont les causes », explique Tahamida Ibrahim.
10h00. Le recteur est à la bourre. Une dernière étape l’attend, l’école élémentaire publique de Poroani 2. Un détour qui en vaut visiblement la peine tant il est subjugué par la qualité des installations et infrastructures : « C’est un modèle ! » Toutes les salles de classe sont climatisées, un réfectoire est à disposition des élèves, il y a trois points d’eau dispersés dans l’ensemble de l’établissement, de la verdure, de l’espace et les classes sont en sous-effectif. « Lors des réunions des directeurs de la circonscription de Sada, je me vante d’avoir la meilleure école de Mayotte », se réjouit Idaroussi Aminou Dada, le responsable. Dans le souci de vouloir constamment se développer, le directeur intègrera bientôt le numérique comme discipline à part entière avec la commande de plusieurs tablettes, le tout financé par la municipalité. C’est sous une excellente note que le recteur quitte les lieux en direction de Sada.
Au terme de cette visite, Gilles Halbout a tenu à saluer ses pairs : « J’ai senti une équipe municipale vraiment mobilisée car elle a placé l’éducation au cœur de ses priorités. Nous les suivons de près et sommes disposés à les aider ». Andhanouni Saïd est quant à lui satisfait par l’échange. « Le recteur a pu constater tout ce qui a été fait et ce qui est encore à faire. Nous espérons que les moyens continueront à être reversés pour que nous puissions développer davantage l’éducation de nos enfants. » Selon Tahamida Ibrahim, lors de leur dernière réunion, le recteur a proposé une aide financière, matérielle et humaine aux communes qui le souhaitent. « Il y en a qui n’en veulent pas, nous prenons. Nous ne voulons pas de jeunes descolarisés qui errent dans les rues. Nous mettrons en place tous les moyens nécessaires. »
Si à Chirongui les écoles sont prêtes, ce n’est pas le cas ailleurs
Hier, à l’école primaire de M’Gombani la décision fut sans appel. Le protocole sanitaire n’a pas été respecté, il était donc hors de question, autant pour les parents d’élèves que pour les enseignants, de laisser les enfants intégrer l’établissement. « Le protocole stipule qu’il faut procéder au nettoyage de fond en comble, avant et après l’arrivée des enfants », assène Abdou Ali Mlanao, directeur adjoint de l’école primaire. « Depuis lundi, l’école n’a pas été nettoyée, ni les salles ni la cour. Nous sommes arrivés choqués et horrifiés », s’emporte-t-il. Constat cuisant sur les locaux jugés « insalubres ». Les plaignants ont demandé à la mairie de remédier à ce problème pour que les cours puissent reprendre dans de meilleures conditions.
« Insalubres », un propos qui ne passe pas pour Yssad Mohamed Youssouf, directeur des affaires scolaires, qui trouve cela « tiré par les cheveux ». Il assure tout de même que c’est un manquement au niveau des salles de classes, mais « pour ce qui est des sanitaires, le gros point noir des écoles, le travail a été fait ». Le directeur des affaires scolaires de la mairie de Mamoudzou rappelle que cette école est parmi celles qui ont été « externalisées ». C’est-à-dire que la ville fait appel à des sociétés privées pour s’occuper de l’entretien. « C’est une méthode expérimentale que nous appliquons sur 5 écoles qui ont été sélectionnées. Les autres sont à la charge des mairies, par les agents communaux », souligne-t-il. Selon lui, le marché a été attribué à un prestataire avant la crise de la Covid. Celui-ci prévoyait un nettoyage 3 fois par semaine, le lundi, le mercredi et le vendredi. « Un avenant a été relancé, pour redéfinir les termes du contrat afin de pouvoir intervenir 5 fois par semaine, pour une désinfection et un nettoyage quotidien qui répondra au protocole ». Yssad Mohamed Youssouf assure que le nettoyage quotidien débute dès aujourd’hui.
Cette expérimentation compte s’appliquer sur l’ensemble des établissements scolaires. Une mesure dans l’espoir d’alléger le budget de maintenance de la ville. « C’est un test pour comparer le coût et la qualité de travail entre un prestataire et nos agents. » Un bilan sera fait par rapport aux 36 écoles que la municipalité compte intégrer dans le programme.
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