Lors que des affrontements d’une violence inouïe entre bandes rivales ont éclaté la semaine dernière, la direction territoriale de la police nationale doit accueillir de manière progressive une cinquantaine de nouveaux fonctionnaires à partir du mois de septembre. Toutefois, les syndicats craignent que la police aux frontières soit le principal bénéficiaire de cette augmentation des effectifs, au détriment de la sécurité publique.
Que réserve la rentrée de la direction territoriale de la police nationale en termes de recrutements ? À cette question, un officier au sein de l’administration stipule l’envoi imminent de 32 nouveaux fonctionnaires à partir du mois de septembre. Un chiffre non négligeable permettant de gonfler des rangs déjà soumis à rude épreuve. Seul hic pour Aldric Jamey, secrétaire départemental d’Alternative Police, « toutes les mutations sont attribuées à la police aux frontières ». Des renforts surtout « profilés pour le groupe d’appui opérationnel ». De quoi faire également grincer des dents son homologue de l’UNSA, Badrou Ali, qui milite inlassablement pour l’augmentation en capacité de la compagnie départementale d’intervention dans le but de devenir autonome sur l’ensemble de la circonscription et de ne plus avoir recours à la gendarmerie. « Il faudrait une vingtaine de gars supplémentaires pour alléger le temps de travail et adapter le cycle horaire », plaide-t-il, prenant pour exemple la mise en quatorzaine jusqu’à jeudi dernier d’une section en raison de la crise sanitaire pour argumenter ses propos. « Cela devient inquiétant, on a du mal à faire face ! »
Un ras-le-bol généralisé des services de la sécurité publique qui s’explique aussi par la recrudescence de la délinquance en cette période de vacances scolaires. À l’image des événements d’une violence inouïe de la semaine dernière entre des bandes rivales de Mamoudzou et de Koungou. « Vendredi après-midi, on était 16 collègues à gérer la situation face à 150 jeunes de Majicavo. Heureusement que ceux de Kawéni, qui se trouvaient derrière nous, ne nous ont pas attaqués », se remémore Aldric Jamey, qui précise avoir tiré plus de 40 grenades ce jour-là pour disperser les foules. « On est vraiment ricrac… » Cet énième affrontement interloque alors naturellement sur les moyens déployés. « On a de la chance que ça ne pète qu’à un seul endroit en même temps. »
« Plusieurs filières, dont celles qui sont le plus sous le feu »
Face à toutes ces spéculations concernant l’évolution des effectifs de la DTPN, la préfecture assure que « les discussions sont encore en cours avec la direction centrale pour maximiser les arrivées ». Seule certitude à l’heure actuelle ? Les renforts seront « d’une cinquantaine au minimum » et renforceront « plusieurs filières, dont celles qui sont le plus sous le feu », affirme les services de l’État, qui se montrent optimistes quant au dénouement des négociations. Quant à leur déploiement, il se fera « de façon progressive » à partir de septembre. Selon nos informations, une première vague de 32 fonctionnaires doit effectivement débarquer sur l’île aux parfums, avant que deux autres ne lui emboîtent le pas par la suite. « Et ce n’est pas parce qu’ils sont affectés à la PAF qu’ils ne feront pas de la sécurité publique », appuie-t-on du côté de la DTPN. Suffisant pour calmer les ardeurs des uns et des autres ?
Si la lutte contre l’immigration clandestine en mer reste indéniablement l’objectif numéro un du gouvernement, la réalité sur la terre ferme demande une attention tout aussi particulière. « Il faut renforcer les brigades de roulement car elles sont déficitaires la nuit. Il n’est pas rare qu’un seul fonctionnaire se retrouve avec deux adjoints de sécurité… Ce n’est pas normal », critique un officier sous couvert d’anonymat. Et cette problématique semble aussi s’appliquer aux groupes de sécurité de proximité. Alors, Badrou Ali compte sur sa récente rencontre avec le sénateur Thani et le député Kamardine, qui ont tous deux poussé un coup de gueule en raison de l’insécurité grandissante, pour que les doléances des forces de l’ordre remontent jusqu’aux oreilles des responsables politiques à Paris. Car pour Aldric Jamey, il y a urgence. À ce rythme-là, il craint tout simplement que seul « un drame pourra faire réagir la direction ». « On n’a aucun moyen d’atténuer les tensions. Les foundis et les anciens ne sont plus respectés, les jeunes s’en foutent complétement », déplore le syndicaliste. « À la moindre étincelle, ça peut exploser ! Ça aurait très bien pu se finir avec les flingues en main s’ils nous avaient chargés [vendredi]. » Et dire que le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin déclarait, il y a moins d’un mois : « Il n’y a pas de zone de non-droit, il n’y a pas d’endroit où l’on ne va pas en République. » Une déclaration qui ne s’applique visiblement pas au 101ème département.
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