La gestion de la crise Covid-19 à Mayotte est fortement pointée du doigt par les partenaires sociaux mais également les particuliers. À l’exemple de l’avocat Nadjim Ahamada qui met en cause l’État, le CHM et l’ARS de Mayotte. De son côté, le collectif intersyndical de Mayotte entame également une procédure de plainte contre les mêmes autorités.
“J’accuse l’ARS de Mayotte et le préfet d’avoir une gestion pas très rigoureuse de la crise actuelle relative au coronavirus”, prévient d’emblée maître Nadjim Ahamada. En effet, par le biais d’un courrier datant du 2 avril, l’avocat a annoncé vouloir poursuivre en justice l’ARS et l’État pour divers motifs qui auraient conduit l’île à la situation dans laquelle elle se trouve actuellement. Nadjim Ahamada déplore en premier lieu la fermeture tardive de l’aéroport de Pamandzi. “On savait que les premiers cas allaient arriver par l’aéroport. La mesure était donc nécessaire. Le préfet avait la possibilité de le faire, il aurait dû préconiser de fermer l’aéroport plus tôt”, explique l’avocat. L’État est également accusé d’avoir maintenu le premier tour des élections municipales alors que la menace de contamination planait au-dessus. L’Agence régionale de santé de Mayotte n’est pas laissée en reste, bien au contraire. Selon Nadjim Ahamada, elle “n’a pas anticipé l’introduction inéluctable du virus à Mayotte en ne mettant pas en quarantaine ou à tout le moins quatorzaine stricte, les passagers venant de métropole qui ont été les premiers cas constatés à Mayotte.” Il nous a annoncé que le recours est également dirigé contre le CHM.
Le collectif intersyndical de Mayotte interpelle, dans une lettre ouverte du 6 avril, l’ARS, le CHM et le préfet. Il demande la “totale transparence promise au sommet de l’Etat pour partager les données complètes et détaillées sur l’état de notre système sanitaire, des ses effectifs, des stocks disponibles en matériel et des renforts prévus avec un calendrier clair.”
“Si on laisse les choses telles qu’elles sont, on va tous mourir”
Même si les deux recours sont distincts sur la forme, sur le fond ils demandent la même chose, à quelques détails près. Nadjim Ahamada souhaite que le tribunal donne injection à l’ARS et au CHM de commander 400 000 tests du covid-19 (chiffre qui correspondrait à la population estimée de l’île). Le collectif intersyndical de Mayotte se demande quand est-ce que les personnels les plus exposés pourront être testés même s’ils sont asymptômatiques. Une demande que l’on retrouve également dans le recours de Nadjim Ahamada.
Ce dernier évoque aussi la question des masques. Il est désormais évident que le monde entier est en pénurie de masques mais selon lui, le CHM doit prendre l’initiative d’en commander. “Ce doit être des masques FFP2 et FFP3, c’est à dire des masques avec des normes de sécurité qui permettent de protéger. Les masques en tissu ne protègent rien du tout”, explique-t-il.
Enfin, le collectif intersyndical de Mayotte, tout comme M.Ahamada exigent une transparence totale sur les moyens humains, médicaux, et le matériel mis à disposition de notre territoire. “Il y a un flou qui entoure les moyens dont on dispose, alors qu’on a besoin de cette transparence pour savoir où on va”, souligne Estelle Youssouffa.
Nadjim Ahamada annonce que pour le moment son recours n’est pas encore déposé mais ce sera fait dans les plus brefs délais. Il aurait souhaité que des syndicats se joignent à son initiative. Quant au collectif intersyndical de Mayotte, les autorités mises en accusation ont jusqu’au 8 avril pour apporter une réponse, avant que le collectif dépose sa plainte. « Je ne fais pas de la politique politicienne, c’est de la politique citoyenne. L’objectif n’est
pas d’entrer en confrontation avec l’Etat et l’ARS. Le but est de les faire bouger car si on laisse les choses telles qu’elles sont, on va tous mourir”, conclut Nadjim Ahamada.
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