Un rapport commandé par Bercy assassine l’octroi de mer

La taxe spécifique aux départements d’Outre-mer devrait être révisée d’ici la fin de l’année. En conséquence, deux experts du FMI ont envisagé le scénario le plus profitable aux économies locales. La création d’une TVA spécifique à chaque territoire apparaît alors comme un outil plus viable pour les collectivités et permettrait par la même de faire baisser les prix à la consommation. 

Il avait vu le jour en 1670 pour soutenir l’économie des collectivités ultramarines, et constitue d’ailleurs, aujourd’hui encore, leur principale source de revenus. L’idée de l’octroi de mer pourrait alors sembler bonne, pourtant, un rapport commandé par Bercy et rédigé par deux experts pour le fonds monétaire international (FMI) préconise tout bonnement la suppression de cette taxe, dont les modalités devraient être redessinées au 31 décembre prochain. D’où l’intérêt du document de 52 pages publié fin mars par les chercheurs Bernard Laporte et Anne-Marie Geourjon sur le site de la Ferdi, fondation pour les études et recherches sur le développement international, un think-thank indépendant. 

D’abord, l’octroi de mer nourrirait l’incapacité des départements ultramarins à faire face à la concurrence européenne et internationale, puisqu’il engendre un certain nombre de surcoûts pour les entreprises et les populations locales, dont beaucoup dépendent de l’importation, comme Mayotte le prouve dans de nombreux domaines. “Dans certains DOM, il est ainsi permis de douter de l’effet protecteur de l’octroi de mer sur l’économie locale, tant le système de protection/exonération est alambiqué et non maîtrisé par les administrations locales”, jugent ainsi les auteurs du rapport. “La TVA, entre autres, apparaît comme un outil économiquement neutre pour mobiliser plus de ressources”, les taux appliqués actuellement dans les DOM y étant “(beaucoup) plus bas qu’en métropole, voire nuls à Mayotte et en Guyane”. Si cette piste était privilégiée, cela se traduirait par une baisse des prix à la consommation de “4,6 à 9 %”, et donc une hausse de l’activité qui permettrait de réduire “de 1,5 à 4 %” les écarts des PIB locaux avec celui de la métropole. Le tout en relançant potentiellement l’emploi. 

“Les pertes de revenu pour les collectivités territoriales pourraient être entièrement compensées par une augmentation progressive des taux de TVA, considérant les spécificités de chaque territoire, et une hausse des droits d’accises sur le tabac”, fait encore état le rapport Ferdi. Un système qui viendrait simplifier le processus de modification des taux actuels, jugé “peu transparent, instable et par la même imprévisible”. Preuve en est, sur la seule année 2017, le calcul de l’octroi de mer a été revu à trois reprises à Mayotte. De quoi décourager de potentiels investisseurs extérieurs et nourrir un certain immobilisme de l’économie locale. 

Interrogés par nos confrères de France-Antilles Guadeloupe, Bernard Laporte et Anne-Marie Geourjon considèrent ainsi l’octroi de mer comme étant une taxe “plus mauvaise que tous les systèmes douaniers que l’on peut voir dans les pays en voie de développement”. “Si vous fabriquez des vélos, mais que vous devez importer des pneus, les taux de taxation de l’octroi de mer pour les pneus ne vous garantissent pas qu’au final votre produit sera moins cher qu’un vélo complet importé” avaient-ils alors illustré. “Nous ne remettons pas en cause le besoin de protection des productions locales, mais nous disons que si on veut combler le handicap de la production des départements d’Outre-mer, il y a d’autres outils plus efficaces”. Le déploiement de la TVA sera-t-il celui choisi lors de la révision de l’octroi de mer ? Réponse dans sept mois.

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