Depuis le 15 juillet, 14 des 28 salariés du laboratoire privé de Mayotte sont en grève. Ce mouvement social entraîne un certain nombre de perturbations au sein du fonctionnement de l’établissement puisque la plupart des patients subissent les foudres des employés en colère. La direction, les grévistes et la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Dieccte) se sont réunis ce mardi pour tenter de trouver un accord dans le but de reprendre un rythme de travail normal.
Flash Infos : Dans une note à l’attention de l’ensemble du personnel de la société Mayo Bio, vous revenez sur le mouvement social auquel le laboratoire est confronté depuis maintenant plusieurs semaines. Le ton employé démontre une certaine exaspération à l’égard de vos employés grévistes…
Didier Troalen : Tout d’abord, je tiens à préciser que laboratoire peut assurer ses différentes missions. Toute la chaîne de production et d’actes médicaux est possible. Le seul problème est que le personnel non-gréviste se fait malmené et insultés quand il vient travailler. Nous avons par exemple recensé un certain nombre de propos racistes à son égard ainsi que des pneus crevés. Nos préleveurs qui se rendent à l’extérieur sont également suivis et menacés… Nous sommes obligés de donner rendez-vous aux libéraux en ville pour récupérer leurs prélèvements. Mais le plus grave dans cette histoire est que nous faisons face à un blocage systématique des patients, qui ne peuvent pas accéder à nos locaux. C’est tout simplement inadmissible ! La santé devrait être un sanctuaire… Nous avons une mission vis-à-vis de la population qui est d’assurer les soins. Que ces employés refusent de travailler, c’est leur droit, mais actuellement, ils entrepassent leur droit de grève !
FI : Les employés grévistes, par la voix de leur représentant Ben Housman Abdallah, dénoncent le non-respect du protocole signé lors du dernier mouvement social qui s’est déroulé en avril 2019.
D. T. : L’ensemble du protocole a été respecté ! Il y a des points qu’ils veulent à nouveau remettre en cause. Dans notre entreprise, au cours des dernières années, pleins d’avantages ont été négociés, comme le passage au 35h payé 39h, l’instauration du 13ème mois, la prime de fin d’année d’intéressement, la prise en compte de l’ancienneté tous les 3 ans, ou encore l’application volontaire de la convention collective qui n’est pas obligatoire à Mayotte. Tout cela était dans le protocole d’accord. Là où ça bloque, c’est sur une question salariale. Ils voudraient que nous appliquions d’emblée des salaires sur lesquels nous avons 25% de charges contre 7% à Mayotte.
FI : Par ailleurs, cette partie du personnel évoque un climat pesant depuis plus d’un an et met en lumière le non-remplacement de trois des huit techniciens qui ont quitté leurs fonctions.
D. T. : Tout cela, c’est pour appuyer leurs propos ! Les recrutements à Mayotte sont très difficiles. Les gens ne restent pas. Je ne vous apprends rien en disant que le turnover est très important et que les temps de présence sont très courts sur le territoire. À condition égale, les personnels qualifiés préfèrent aller à La Réunion ou rester en métropole. Les départs sont liés à ces difficultés alors que les conditions de travail sont meilleures depuis le dernier conflit. Ce n’est pas le laboratoire qui ne les attire pas, puisque quand nous annonçons les conditions salariales, ils viennent.
FI : Ce mardi, vous avez rencontré les grévistes en compagnie de la Dieccte. Qu’en est-il ressorti ? Sommes-nous proches d’une levée du piquet de grève ?
D. T. : Rien n’est encore statué au niveau de la réunion avec la Dieccte et les salariés. Nous sommes encore en phase de discussion. Tout ce que je peux vous dire, c’est que nous reprenons toutes leurs revendications et que nous travaillons dessus. Le but est de trouver un accord et de ramener les grévistes à la raison pour qu’ils arrêtent de procéder à des actes délictueux. Nous allons faire des propositions concrètes dans l’espoir d’avancer, mais nous n’irons pas plus loin qu’un certain niveau. Nous ne voulons pas être pris en otage, comme cela a pu être le cas au cours des dernières semaines. Nous espérons tout simplement que la situation se débloque pour reprendre un rythme normal, notamment pour les patients chroniques et ceux qui doivent être pris en urgence. Si ce n’est pas le cas très prochainement, nous risquons de faire face à de graves problèmes sanitaires.
Légende 1 : Le lundi 20 juillet, les salariés grévistes ont sillonné les rues de Mamoudzou, depuis le laboratoire jusqu’aux locaux de l’agence régionale de santé où ils ont été reçus par une délégation, en l’absence de Dominique Voynet.
Légende 2 : En avril 2019, une partie des employés avait déjà manifesté leur mécontentement à l’égard de la direction. Selon le docteur Troalen, le protocole d’accord signé à cette période a été respecté.
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